Cas d’étude d’une buse autoroutière aménagée pour la truite
La France dispose d’un réseau autoroutier particulièrement développé. On compte en effet plus de 140 autoroutes, représentant près de 10 000 km de voies réparties sur l’ensemble du territoire. Ces autoroutes franchissent des centaines de rivières, du petit ruisseau de tête de bassin jusqu’aux grands fleuves. Les rivières de taille importante sont franchies grâce à la construction de ponts, en revanche, celles de taille plus modérée ont été équipées de buses, largement dimensionnées pour entonner tout leur débit, y compris en crue. Ces buses, de grande section, disposent également de longueurs particulièrement importantes compte-tenu de la largeur des voies autoroutières et de leur angle d’implantation. Globalement, ces buses présentent des longueurs comprises entre 50 et 120 mètres.
Si désormais sur les projets neufs d’infrastructures linéaires (les autoroutes mais on peut citer également les voies ferroviaires et les routes en remblais), l’attention se porte davantage à l’implantation de ponts et portiques sur les cours d’eau pour moins impacter leur lit, les buses existantes sur les infrastructures en service peuvent présenter des contraintes en matière de continuité écologique, et au premier plan les mouvements de poissons.
Plusieurs critères, parfois cumulés, sont particulièrement pénalisants : la présence d’une éventuelle chute à l’aval de la buse, l’absence de rugosités au sein de la buse, des vitesses d’écoulement homogènes et souvent contraignantes, un tirant d’eau faible (a fortiori à l’étiage) et une distance importante à parcourir dans ces conditions. On pourrait rajouter à cette liste, et pour certaines espèces qui se déplacent majoritairement en journée, le contraste de luminosité provoqué par la buse, ce point étant exacerbé dans le cas des buses autoroutières du fait de leur grande longueur.
Aussi, dans le cadre de la politique nationale de restauration de la continuité écologique, les sociétés autoroutières et les gestionnaires d’infrastructures s‘emparent progressivement de cette problématique et développent certaines expérimentations (avec l’appui de l’OFB et du CEREMA). L’équipement des buses, compte-tenu de l’espace contraint, s’est révélé particulièrement « challenging ».
Un important équipement d’une buse autoroutière existante a été réalisé par VINCI Autoroutes sur l’A89, un ouvrage de 104 mètres de long qui permet le passage de la rivière Durolle dans le Département du Puy-de-Dôme. L’équipement a notamment consisté à supprimer la chute, rehausser la ligne d’eau en aval et implanter des rugosités de différentes tailles et hauteurs au sein de la buse pour dissiper l’énergie, augmenter le tirant d’eau et générer une hétérogénéité de vitesses d’écoulement (voir photo).
A l’issue de ce travail, le gestionnaire autoroutier a souhaité évaluer in situ si son aménagement était efficace. Il a alors lancé une étude (confiée au bureau d’études SCIMABIO Interface) basée sur le suivi individuel des déplacements de truites communes (l’espèce cible de l’aménagement) à partir de la technologie RFID (Radio Fréquence Identification). Pendant 2 ans, des truites « pucées » ont été suivies à proximité de la buse, à l’aide d’’antennes fixes placées à la sortie de la buse et de prospections mobiles permettant de géo-localiser précisément chaque individu.
Les résultats de ce travail ont fait l’objet de la rédaction d’un article qui vient d’être publié dans la revue « Sciences Eaux et Territoires » de l’INRAe. Cette étude pourrait servir à mieux intégrer les besoins de déplacements de la truite de rivière dans les opérations futures de maintenance d’ouvrages hydrauliques sur les infrastructures linéaires.
Voir l'article : La technologie RFID pour évaluer le franchissement piscicole d’une buse aménagée de grande dimension