Il y a un peu plus d'un an, date du précédent éditorial (qu'il est difficile de se plier à une contrainte de fréquence quand on se refuse à brasser de l'air), nous tirions un bilan plutôt enjoué d'un été humide, bienfaiteur pour nos régions salmonicoles. Ironie du sort, le ton en ce début d'automne 2022 n'est plus du tout à la fête.
Je ne reviendrai pas en détails sur les coups de boutoir qui ont frappé les milieux aquatiques européens cette année, nous aurons peut être l'occasion de dresser un bilan durant l'hiver. Mais, entre une météo terrifiante, des pouvoirs publics à la gestion ubuesque, un sentiment de marginalité face à l'indifférence quasi généralisée de nos concitoyens, le tout saupoudré de quelques vidanges de barrage mortifères (coucou l'EDSB, la SHEM et EDF) et vous vous estimez heureux, une fois septembre arrivé, d'avoir conservé une santé mentale à peu près correcte...
A la rédaction de Truites & Cie, plusieurs d'entre nous avons été littéralement sonnés par cette conjoncture, comme bon nombre de passionnés, assistant impuissants à l'agonie du théâtre de notre passion. Nous ne pensions pas que cela arriverait si vite. Certes, les signes avant coureur se sont multipliés ces dernières années, mais le scénario cauchemardesque 2022 (pas de neige en hiver + succession de vagues de chaleur dès le printemps) a quand même surpris tout le monde. A ce jour, nous n'en avons même pas encore fini avec les envolées du thermomètre, la fable continue !
Dans ce contexte funeste, continuer notre train train comme si de rien n'était, à coups d'articles présentant du beau matériel ou des destinations pêche exotiques m'est apparu indécent. L'envie a clairement fait défaut, un terrible et lancinant "A quoi bon ?" revenant régulièrement quand je songeais au sens de tout cela.
Mais, une fois la phase de choc passée, il a fallu penser à la suite. De toute crise, il est bon de sortir grandi, ou tout le moins, différent. Nous n'y échapperons pas. Ainsi, je profite de la tribune qui m'est donné pour vous annoncer que nous modifierons de façon substantielle le contenu des publications dès l'été prochain, nous octroyant le droit de mettre en stand bye certaines rubriques divertissantes et légères, au profit de sujets d'actu, certes assez prises de tête (à un moment de l'année où vous n'en avez peut être pas très envie) mais plus en adéquation avec l'idée que nous nous faisons d'un magazine de pêche de la truite sérieux et honnête.
Cette forme de militantisme restera la clé de voûte de Truites & Cie, couplée à notre volonté de traiter les sujets inhérents à la gestion de manière rationnelle et objective, au risque comme d'habitude de nager à contre-courant. D'ailleurs, cette rigueur apparaît aujourd'hui d'autant plus nécessaire : lorsque les pressions environnementales s'accumulent sur les milieux, les pêcheurs eux, se réfugient illico dans les poncifs habituels du durcissement réglementaire... il a par exemple été assez incroyable de constater le nombre de pressions exercées sur les FDAAPPMA durant l'été dans l'optique de fermer la pêche... mesure dont on se demande encore quelle vertu biologique pourrait-elle bien avoir ? De même, il y a fort à parier que des voix s'élèveront cet hiver pour instaurer quelques nouveaux parcours No-Kill par-ci, ou interdictions de wading par-là.
Si notre magazine n'est clairement pas le plus résilient qui soit dans le paysage de la communication pêche moderne, nous nous emploierons à le pérenniser en le rendant utile, sans raconter de salade, à défaut de pouvoir poursuivre une route insouciante comme 20 ans en arrière.