
Par Camille et Iprere.
Fille d’un papa pêcheur et pisciculteur et partageant sa vie avec un passionné de pêche des
salmonidés, c’est très tôt que Camille a pu se familiariser avec les diverses techniques permettant de
leurrer ces derniers, même si la pêche à la mouche a sa préférence. Voyageuse inconditionnelle, elle
pose aujourd’hui ses valises en Islande d’où elle ramène de nombreux conseils qui vous permettront,
à votre tour, de réussir à coup sûr un tel voyage. Laissez-vous guider :
Certaines destinations semblent aujourd’hui nécessaires à la construction de tout pêcheur(se) de
truites itinérant, devenant par instant funambule. En équilibre entre différentes réglementations
sibyllines, jonglant avec les langues, la planification d’itinéraires n’est pas de tout repos et demande
du temps. Beaucoup de temps. Parmi ces destinations paradisiaques, l’Islande se fait, à mesure des
années, une réputation de choix parmi toutes.

Pour commencer, il est nécessaire de bien comprendre le modèle de fonctionnement de la pêche dans ce pays. Simple en principe, difficilement accessible en pratique.
Toutes les rivières, lacs ou autre flaques d’eau sont privées, entièrement détenus par le propriétaire foncier. De fait, vous n’aurez aucun droit d’accès et encore moins de pêche sur quelconque propriété privée. Toutefois, si vous réussissez à vous entretenir avec un propriétaire terrien, ce dernier pourra, de droit, vous autoriser à pêcher chez lui… et ce pour n’importe quel prix, fixé à sa guise, nous y reviendrons…

De nombreuses associations de riverains, d’actionnaires ou simplement de pêcheurs, achètent ou louent les droits de pêche sur la plupart des rivières/lacs du pays. C’est au travers de ces dernières que vous pourrez obtenir le saint-Graal permis de pêche.

Il en existe de nombreuses, disséminées aux quatre coins du pays. Certaines, dont il n’existe aucune trace sur le net, vivent sur le profit d’une réputation halieutique depuis longtemps acquise. D’autres, très visibles, s’érigent en véritables machines marketing.

Je tiens d’ailleurs à souligner que la richesse halieutique des lacs/rivières ne varie pas en fonction de la publicité faite ou non. De manière générale, vous ne serez jamais déçus.
Une fois l’aspect réglementaire déblayé, je tiens à revenir sur le prix de la pêche en Islande. Tout d’abord, le tourisme pêche y est essentiellement basé sur le saumon. Les rivières en contenant sont tout simplement, pour la plupart, hors de prix (ou encore réservées jusqu’à 4 ans à l’avance). Vous pouvez toujours rêver, et le rêve a un coût. Le corollaire du succès des rivières à saumon profite toutefois à nous autres pêcheurs de truite. Et pour cause, cette dernière espèce est, au mieux, le « sauve bredouille » de saumoniers en mal de combat lorsque les conditions ne sont pas favorables à la remontée des migrateurs ; cela se ressent sur les prix. Là où une rivière à saumon « banale » sera pêchable pour un coût compris entre 600 et 1600 euros, les rivières à truites (et les meilleures s’il vous plaît !) se cantonnent autour d’une centaine d’euros seulement pour les plus fréquentées. Seulement vous dites-vous ? Oui, pour nous autres Français habitués à une carte annuelle à 96 euros, cela représente une certaine somme… d’autant plus lorsque l’on continue de croire que la carte est toujours trop chère dans notre pays…

Cette mécanique est la même pour les lacs ! Sauf que…
Sauf qu’une association a racheté les droits de pêche d’une cinquantaine de lacs répartis au travers du pays. En associant l’ensemble des lacs sur une carte unique à 54 € (carte annuelle), ils ont rendu ces lacs accessibles au plus grand nombre ! (tiens… cela ne nous rappelle-t-il pas la naissance d’un certain système associatif ?). Comme mentionné plus haut, leur accessibilité n’enlève rien à leur potentiel halieutique. Cela m’emmène à présent à vous parler de la pêche en lacs :
La pêche en lac :
N’allons pas nous mentir, vous aurez froid lors de votre séjour en Islande et c’est d’autant plus vrai lors des sorties de pêche en Lac. Ne vous fiez jamais trop aux températures annoncées par la météo, tant le ressenti est influencé par un vent quasi-constant. Et qui dit vent constant, dit nécessité d'un matériel adapté. Dès lors, une canne de soie de 7 à 8 ne doit pas vous paraître sur-dimensionnée là-bas pour plusieurs raisons.

Premièrement et nous vous le répétons, le vent y est quasi constant, ainsi, vous aurez besoin d’un matériel assez lourd pour pouvoir lancer dans… des conditions pas trop mauvaises ! Même en pêchant dans le sens du vent, déployer de la soie peut vite s’avérer problématique…

Une autre raison est tout simplement la puissance des poissons. Honnêtement, nous étions partis avec des diamètres de fils de 23/100 en pensant déjà être larges pour pêcher la truite. Que nenni, nous avons pu rapidement constater que le ratio taille/poids/puissance des truites islandaise était largement disproportionné par rapport aux truites françaises.

La présence du vent rend très difficile la pêche en sèche qui s’est avérée bien moins productive que la pêche au streamer.
Une caractéristique bien marquée des lacs islandais est leur très faible profondeur. Ainsi, même avec une soie à pointe légèrement coulante, les accrocs furent très fréquents. L’emploi d’une soie flottante et le lestage simple des streamers semblent des plus adaptés à posteriori.


Lorsque l’on évoque la faible profondeur des lacs, nous sommes obligés de faire part de la faible pente des berges. Il vous faudra souvent vous avancer à plus de 20 mètres du bord pour pouvoir trouver au moins 1 mètre de profondeur… ainsi, la prise de waders me semble quasi impérative en Islande pour pêcher correctement à la mouche. A ce propos, la maîtrise des lancers en double traction est indispensable pour gagner en distance et en efficacité de pêche.
Concernant les streamers, nous avons pu remarquer que l’emploi de modèles très conséquents (streamers à brochets pour faire simple) ne décourageaient absolument pas les plus petites truites. Mais plus impressionnant encore, les gros spécimens semblaient tout simplement bouder les petits streamers classiquement employés en France… en bref, n’ayez pas peur de vous équiper en grosses lignes et gros streamers. Vous ne le regretterez pas, mais le contraire si…

En termes de modèles et coloris, nous avons la plupart du temps pêché avec des streamers type Zonkers Blackghost mais franchement… toutes les teintes y sont passées et toutes ont fonctionné.
Arrivés ici, vous vous dites que la pêche doit être d’une grande simplicité dans tous ces lacs remplis de poissons… et bien vous avez raison… mais seulement la moitié du temps on va dire !
Nous avons eu la chance de pêcher pas loin d’une dizaine de lacs différents tout autour de l’île. Tous de grande qualité j’en suis sûre. Toutefois, dans certaines conditions climatiques, nous avons pu prendre des capots monumentaux. Pire, nous avons pu passer du tout au rien d’un jour à l’autre sur un même lac.
Il semble donc qu’un ciel bien dégagé couplé à un fort vent soit une combinaison peu favorable à l’exercice de notre passion. A l’inverse, un ciel couvert a, de manière générale, toujours donné de bons résultats. Donc pêche facile oui, mais dans certaines conditions… Lorsque celles-ci n’étaient pas réunies, nous quittions les lieux vers d’autres aventures en attendant un temps meilleur… (d’ailleurs, la météo peut changer très vite, en bien comme en mal… assurez-vous donc de toujours avoir un imperméable à portée !).
Malgré notre instinct naturel de pêcheur à toujours vouloir faire le tour du lac pour vérifier si la berge opposée était meilleure, nous nous sommes vites aperçus qu’une pêche stationnaire et insistante donnait toujours de très bons résultats tant les poissons semblent abondants et prompts à se déplacer.

Ainsi, nous pouvons dire de manière très sûre que les amoureux des pêches de salmonidés en lacs ou réservoirs trouveront leur bonheur au sein des multiples lacs Islandais, quel que soit leur prix…
C’est bien beau de vous parler des lacs mais voyons un peu du côté des rivières !
La pêche des rivières :

Comme dit précédemment, vous devrez débourser autour d’une centaine d’euros pour pouvoir pêcher une rivière à truite. Nous ne pouvons, à notre niveau de connaissance, vous affirmer que toutes valent leur prix. Toutefois, celles où nous avons eu la chance de nous rendre en valait largement la chandelle, malgré des conditions peu favorables et des débits très bas. Pour information, nous avons pu pêcher la Laxa et la Varma en réservant les journées 6 mois à l’avance (ces deux rivières étant d'ailleurs les plus connues et sans doute les plus fréquentées). Un avantage intéressant du permis islandais est qu’il est délivré non pas nominativement mais pour une canne à pêche. Ainsi, vous pouvez prendre un permis pour une « canne pêchante » et pêcher à tour de rôle sans limite de pêcheurs présents… Ce qui ramène le prix du permis à la personne à une cinquantaine d’euros en cas de duo.


Pour les rivières comme pour les lacs, je ne peux que vous conseiller de pêcher GROS ! Vous n’allez pas en Islande pour vous contenter de leurrer des truites de 40cm et vous pourrez rapidement toucher des poissons entre 55 et 70cm. Ainsi, nous regrettons encore amèrement de n’avoir pris que du 23/100 lors du premier jour en rivière.

Nous cassâmes en conséquence un grand nombre de poissons. De plus, nous avons eu beaucoup de ratés et de décroches sur les streamers, les truites les attaquant plus par agacement que par réel instinct de prédation (pour la plupart…). Nous vous encourageons donc à monter vos streamers sur de gros hameçons simples ou doubles afin de limiter les ratés. Pour être plus précis, les grosses truites « suivaient » les streamers tout en essayant de « délicatement » d'attraper (même pas de mordre…) la partie la plus postérieure du leurre éloignée de l’hameçon… Comportement qui fut complètement différent des truites de lacs, qui elles, venaient pourfendre les mouches tout en vous faisant échapper la soie des mains par la violence inouïe des touches.

La plus grande singularité des rivières islandaises fut pour nous la présence de spécimens impressionnants dans des cours d’eau étonnamment petits. De fait, la gêne du vent y est moindre de part les faibles distances de lancer. Quel bonheur de pêcher de si petites rivières et de voir, au bout de 3 ou 4 lancers, votre streamer en lapin de 15 cm se faire malmener par des bécards de 65cm….

La pêche y est de manière générale quasi-exclusivement gérée en No-Kill mouche. La forte capacité biogénique des rivières permet d’obtenir de très gros poissons rapidement et en grand nombre. Soyez sûr d’une chose, vous ferez du poisson… beaucoup de poissons… des gros… des « moins » gros et des très gros !

Des horaires particuliers et variables au fil des saisons sont imposée au pêcheur, le plus courant étant 8-12h et 16-21h. Largement de quoi tordre le carbone puis de vous reposer après 4 ou 5 poissons records…

Nous avons commencé à bien ratisser la rivière par peur de manquer des poissons dans les courants. Ce fut une erreur stratégique bien vite corrigée. Le stratagème fut de pêcher seulement les gros « pools » à la recherche des plus beaux poissons tout en progressant très rapidement le long de la rivière.Clairement, les poissons se positionnent par tranche d'âge en fonction des dimensions des pools. Dans les plus profonds, nous avons pu observer jusqu'à 3/4 poissons entre 60 et 70cm. La résultante est que dans les zones de courant, vous ne toucherez généralement que les plus petits individus.

Les rivières sont largement pêchables en nymphe ou en sèche, toutefois, nous avons obtenus les meilleurs résultats avec de très gros streamers. Pour les pêches fines, misez plutôt sur les mois de juillet/août.
La plupart du temps, une soie de 7 flottante couplée à une pointe de 1.5m de fluorocarbure en 26/100 devrait vous permettre de pêcher de la manière la plus efficace (les poissons n’hésitant pas à monter violemment se saisir de gros streamers en surface).


Sur la rivière Varma, il est possible, en cas de fortes précipitations (ce qui ne fut pas notre cas), d’assister à la remontée spectaculaire de nombreuses truites de mer voire de saumons (pour la somme restant modeste de 90 euros…). Je passe la parole à Iprère pour le récit d'une anecdote à ce propos :
« En plein cœur du village de Hveragerdi, nous avons observé une magnifique truite essayant en vain de franchir un seuil durant deux jours. J’ai pu traquer ce poisson à deux reprises en pleine journée, mais rien ne semblait le décider... arborant des mensurations hors normes, cette truite continuait, sans relâche, de sauter à la manière d’un dauphin à quelques mètres de nous. Lors de sa première observation, ma compagne affirma qu’elle « allait me montrer comment attraper ce genre de poisson » … Réplique à laquelle je ne pus m’empêcher d’esquisser un léger sourire narquois… Deux jours plus tard, après deux décroches, une syncope suivie d’un sprint pour récupérer l’épuisette dans la voiture, elle finit par mettre au sec cette majestueuse truite de mer de 70 cm pour plus de 5 kg. »

Nous vous quittons sur cette petite anecdote qui, nous le souhaitons sincèrement, vous encouragera à aller découvrir ce pays exceptionnel. Nous espérons enfin qu'avoir dégrossi les informations principales à propos de ce pays vous facilitera la tâche et vous aidera à construire votre projet. En Islande, le rêve a un prix. Une fois vécu, ses souvenirs n’en ont pas.
PS : L’organisation de ce voyage fut largement aidée par les nombreuses astuces et vidéos fournies par Stanislas Freyeit alias Nymphévolution : https://nymphevolution.com/


