Géovan

Tout savoir sur les systèmes de soie shooting (1/2) : les shooting line

soie shooting

Une fois n’est pas coutume, j’aimerais commencer cet article par un petit peu de sémantique. En effet, lorsque l’on veut désigner ce qui nous sert de ligne en France pour pêcher à la mouche, on emploie le mot « soie » et tout le monde sait de quoi l’on parle. Cependant, je trouve personnellement ce terme trop réducteur. En effet, si l’on fait le parallèle avec le monde anglo-saxon (et en fait le reste du monde en matière de pêche à la mouche), lorsque l’on utilise le terme « soie », ou « silk » en anglais, on désigne en fait un type particulier de ces dernières : on parle d’une ligne en soie naturelle. Ce terme n’a de valeur qu’ « historique » en référence à la matière utilisée pour confectionner l’objet. Ce terme de « soie » n’englobe pas nombre de types particuliers de ces objets qui nous servent à présenter nos mouches aux poissons. C’est en ce sens que j’emploierai le terme de ligne (ou line en anglais) afin de mieux coller à la diversité d’offre en la matière, tout en précisant de quel type de ligne nous parlons. Ainsi, une ligne ou line est WF, DT, parallèle... un shooting head ou encore un shooting line, pour en revenir à ce qui nous intéresse plus particulièrement dans cet article : les shooting line ou running line en fonction des désignations commerciales.

Texte

Quelques définitions

En théorie, il faudrait parler de running line pour les lignes d’un seul tenant de profil WF et de shooting line pour la partie précédent le shooting head dans le système de soie shooting. 

En pratique dans le langage courant, on utilise indifféremment running line ou shooting line pour désigner la même chose, à savoir une section de ligne parallèle placée à l’arrière d’un profil tête appelé shooting head dont nous parlerons dans le prochain article.

La jonction des deux éléments se fait boucle dans boucle. Ce sont des configurations que l’on utilise pour des pêches spécifiques, en général lorsque la distance est un facteur important dans la réussite, comme en réservoir, en mer pour des pêches très rapides ou spécifiques du bord. Soit les pêches avec cannes switch et une main au steamer, où l’on ne cherche pas à ramener la ligne jusqu’au bas de ligne dans les anneaux (en effet, le raccord boucle dans boucle même si il est très fin n’est jamais aussi facile à utiliser qu'une ligne WF complète sans raccord entre la partie running et la tête) et les pêches à deux mains des migrateurs.

C’est au fait de cette diversité d’usages et de situations, que vous devrez choisir votre shooting line afin d’avoir l’outil le plus adapté. Chaque usage implique des contraintes et des besoins spécifiques.

Image
shooting line
Légende
Composition d'un système de soie shooting
Image
shooting line
Texte

Les shooting line avec coating 

Commençons donc par les shooting line avec un coating. Ce sont ceux qui ressemblent le plus à une ligne traditionnelle. Basiquement ils sont construits autour d’une âme synthétique sur laquelle on dépose un apprêt : le coating.

Le type d'âme

C’est là que les choses se compliquent et que vos choix en toute connaissance de cause doivent déjà s’opérer. En effet, l’âme peut-être constituée de différents matériaux avec leurs spécificités respectives. En général, le choix se fera entre une âme nylon mono-filament, une âme multi-filament et plus rarement une âme en tresse ou kevlar.

La spécificité du mono-filament est une texture plus raide qui décuple la glisse. Avec l’âme en tresse ou kevlar on obtient une résistance accrue sans aucune élasticité pour un fin diamètre. Enfin, l’âme multi-filament offrira souplesse et élasticité contenue.

La nature des extrémités

Ces running peuvent être équipés ou non d’une boucle à une ou aux deux extrémités. Les boucles facilitent les raccords avec le backing d’un côté pour celui qui ne serait pas certain de bien réaliser son nail knot de raccord. La boucle côté shooting head peut-être petite ou grande pour permettre ou non le passage de tout l’écheveau du shooting head ou au contraire nécessite de faire glisser ce dernier mètre par mètre dans la boucle. Si vous changez régulièrement de shooting head au cours d’une séance de pêche, avoir une grande boucle vous facilitera la vie. Au contraire si vous changez peu de shooting head, une petite boucle offrira une meilleure pénétration dans l’eau et une meilleure glisse en général.

Ces lignes parallèles peuvent toutefois avoir une petite conicité sur quelques mètres au niveau de la boucle côté shooting head. On parle de handling zone pour désigner cette partie spécifique des shooting line. Ce profil qui augmente légèrement le diamètre offre principalement 3 avantages :

  • Une durabilité accrue sachant que c’est la zone la plus soumise aux sollicitations mécaniques (friction, zone d’appui maximale lors du lancer et articulation avec le shooting head).
  • Une meilleure préhension pour éviter les glisses intempestives lors des journées froides avec les doigts engourdis.
  • Un meilleur transfert d’énergie au moment du lancer sachant que c’est la zone d’appui de la canne sur la ligne.

Attention, toutes ces infos sont de petits détails et leur influence ne se traduira pas par 5m de différence au lancer, comprenons-nous bien.

Image
shooting line
Texte

La densité

On peut trouver ces shooting line avec coating en version flottante ou intermédiaire.

Les versions flottantes qui permettent un arraché plus facile et une meilleure visibilité du running sont les plus utilisés. Les versions intermédiaires sont réservées aux pêches plus lentes et profondes, quand on doit soustraire la ligne aux effets du courant ou des vagues par exemple.

Le diamètre

La dernière caractéristique de ces running line est le diamètre qui aura une nette influence sur vos distances de lancer, notamment si vous ne prenez garde à les associer avec les bons numéros (ou plutôt poids) de shooting head. Généralement les diamètres vont de environ 0.60 à 1 millimètre voir 1,1 millimètre.

Grosso-modo :

  • Les diamètres autour de 0,60/0,70mm vont particulièrement bien avec les têtes numéro #7/8,
  • Les diamètres autour de 0,80mm avec les #8/9/10,
  • Les diamètres de 0,9 et plus avec les shooting head de 11/12.

La résistance varie avec le diamètre et se situe en principe entre 25 lbs et 35 lbs, et même davantage dans le cas spécifique des shooting line avec âme en kevlar ou gel-spun.

NB : pour les numéros et poids de shooting head inférieurs il faudra plutôt regarder du côté des running line mono qui seront plus adaptés.

Quelques exemples de running line avec coating : GUIDELINE TSL 2.0 DC (bouclé aux extrémités), ULTIMATE SHOOTING LINE SCIENTIFIC ANGLER (grande boucle avec handling zone)...etc.

Image
shooting line
Texte

Les Shooting line Mono

La seconde catégorie de shooting line est celle des monos. Faits de mono-filament uniquement, ces shooting line sous leur apparence de simplicité renferment une grande diversité. En effet, un simple nylon de fort diamètre peut faire l’affaire me direz-vous. Et en fait, c’est le cas ! Du moins, ce fut le cas au tout début du concept de système shooting. D’une simple ligne DT ou WF coupé et bricolée, raboutée à un nylon de gros diamètre on est passé au système actuel très diversifié et ces monos ont largement évolué... notamment en matière de :

Forme

Chaque type de forme offre divers avantages et inconvénients : 

  • La classique forme ronde est le meilleur compromis entre tenue, confort d’utilisation et effet mécanique dan l’eau.
  • La forme ovale offre un meilleur confort et une meilleure tenue en main mais « cisaille » moins la colonne d’eau.
  • La forme carré ou rectangle quant à elle, « cisaille » plus les doigts mais glisse énormément pour de très longues distances de lancer avec une bonne tenue en mains, tout en réduisant l’effet twist.

Densité

Les dernières technologies permettent aux fabricants de nous proposer en plus de la forme des traitements spécifiques qui apportent plus de glisse, permettant au mono d’être flottant, intermédiaire ou avoir la densité exacte de l’eau. Encore une fois cela correspondra à des usages particuliers.

Les densités intermédiaires permettent de bien cisailler la colonne d’eau pour une immersion rapide du shooting head qui n’est pas retenu vers la surface mais s'ancre beaucoup plus, offrant plus de résistance lorsque l’on récupère le shooting line pour relancer. Un mono avec la densité de l’eau offre des caractéristiques à mi-chemin entre un flottant et un intermédiaire...

Diamètre

Le panel de diamètres et résistances des monos est plus étendu que celui des running line avec coating.

On considère qu’il s’étend de 0,40mm en limite basse pour aller jusqu'à 0,85mm environ.

  • Les résistances varient de 25 lbs a 80/90 lbs. Les plus fins seront parfaitement adaptés pour les usages une et deux mains dans les puissances les plus light (#2/3 en usage deux mains et #4/5 en usage une main pour des lancers spey)
  • Les plus gros diamètres seront utilisés pour les fortes cannes à deux mains puissance #10/11/12. On utilise plus rarement ce type de shooting line sur les puissances au delà de #8/9 pour les cannes à une main.

Quelques exemples de running line mono COMPLINE II GUIDELINE (plat intermédiaire), ULTIMATE RUNNING LINE (rond avec densité de l’eau), SCIENTIFIC ANGLER ABSOLUTE SHOOTING LINE (plat rectangulaire « basique » simple et efficace)...etc.

Image
shooting line
Légende
Exemple de shooting line mono de forme rectangulaire
Image
running line
Légende
Avantages et limites de chacun des deux types de shooting line mono vs coating
Texte

En pratique

Une fois que l’on a toutes ces informations que faire me direz-vous ? Voyons comment vous adapter à vos besoins ! Afin de mieux illustrer mes propos, je vais vous indiquer quelques usages que je fais de ces Shooting Line dans mes pêches et pourquoi j’ai choisi l’un plutôt que l’autre.

Autant le dire tout de suite, je préfère les Shooting Line avec coating ! Ceci ne m’empêche cependant pas d’utiliser les monos pour les applications où ces derniers sont indispensables.

En effet, les shooting avec coating offrent à mon avis (et mon avis qui n’est qu’un avis parmi d’autres !) une tenue bien meilleure, un confort lors des longues séances de pêche avec des centaines de lancers, qu’aucun mono ne peut offrir. Et, c’est cette principale caractéristique que j’apprécie, car la distance de lancer est rarement un facteur limitant sur les pêches que je pratique au quotidien. Ce quotidien est la recherche du saumon sur le Gave d’Oloron afin de bien comprendre:

J'utilise donc principalement deux ensembles :

  • Guideline NT8 12ft9 #8/9 avec shooting #8/9 32/34 gr suivi d’un shooting line TSL Evolve 2.0 de 0,31inch/0,80mm.
  • Guideline NT8 13'9" #9/10 avec les poids de 35/37 gr avec le même running.

Enfin, pour les grandes rivières où les zones basses du Gave d’Oloron, je sors parfois une 14'9" #9/10 pour 35/37 gr et je lui adjoins un running mono 42 ou 50lbs Guideline Compline pour atteindre mes distances maximales de lancer sur certains postes qui le nécessitent.

J’utilise les monos les plus fins 25lbs pour mes pêches à la truite avec des cannes à deux mains de 10' à 11' pour une glisse maximale. Le poids assez réduit des shooting head utilisés pour ces pêches (entre 10 et 20gr environ) n’a pas l’effet arraché que l’on peut trouver sur les cannes à deux mains plus fortes. Il n’y a guère que sur les cannes truite puissances #6/7 que j’utilise un shooting line avec coating pour le confort.

Enfin pour les pêches à une main avec des shooting head du bord soit en lac, en mer et plus souvent dans mon cas en cherchant l’alose, je n’utilise que des running line mono. En effet ces pêches nécessitent soit une distance maximale, soit une vitesse d’immersion maximale du shooting pour bien présenter la mouche. Dans ces conditions, les monos sont à leur aise à mon sens.

J’espère que ces quelques infos sur les shooting line vous permettront de mieux appréhender le choix à réaliser en fonction des conditions de pêche que vous rencontrez et des sensations que vous cherchez lors de vos séances de pêche ! A bientôt pour parler des shooting head !

Image
shooting line

A propos de l'auteur

Fabrice Boucher, 43 ans, pêche depuis l’âge de 10 ans et 33 ans canne à mouche en main.
Après avoir fait une partie de ses études en géographie sur Grenoble où il…