Géovan

Kéré, un paradis méconnu pour la mouche en mer

pêche Kéré

Pour le pêcheur à la mouche en eaux douces féru de carnassiers ou celui qui fréquente déjà nos côtes à la recherche du bar, l’Afrique de l’Ouest et l’archipel des Bijagos ne font pas forcément partie des destinations dont il rêve en secret. Dans l’imaginaire collectif, les Caraïbes, l’Océan Indien ou encore quelques îles du pacifique figurent en tête de liste : Bahamas, Floride, Cuba, Belize, Seychelles, Christmas Islands, etc.

Comme j’ai souvent eu la possibilité de poser mes mouches sur les “flats” de ces contrées, je connais bien les tenants et les aboutissants de ces pêches “à vue” qui concernent majoritairement le bonefish, mais également le tarpon, le permit et d’autres espèces prenables à la mouche.
Pour réussir dans ces beaux pays, il faut y être à la meilleure saison, la plus demandée, donc la plus onéreuse, posséder une bonne à très bonne technique de lancer en double traction, et avoir les moyens de s’offrir les services d’un bon guide opérant le plus souvent en bateau, au départ d’un lodge réputé pour les territoires de pêche auxquels il donne accès….

Pour autant, ce n’est jamais le succès garanti et il ne suffit pas de payer le prix de l’excellence pour prendre les poissons dont on rêve à chaque voyage. Celui dont le budget est limité et qui veut en avoir “pour son argent” revient souvent frustré, si ce n’est déçu.

Le changement climatique renforce également le côté aléatoire des pêches dans des paradis qui présentaient “une stabilité halieutique” à la fin des années 90 et le tout début des années 2000.  De nos jours, on peut très bien “se planter” en ayant signé un chèque à 4 zéros...

Texte

Retour fortuit aux Bijagos

Spécialiste de la pêche du bar à la mouche, qui occupe une bonne partie de ma saison de guidage en Bretagne, j’ai eu depuis plus de 10 ans l’occasion de former de nombreux moucheurs aux subtilités de la mouche en mer. Avec une canne à mouche, le passage à l’eau salée est très fort en émotion, tant la puissance de combat des espèces marines est décuplée par rapport à l’eau douce.  C’est souvent une véritable révélation pour les passionnés qui ont souvent la sensation de pénétrer un nouveau monde, aux ressources infinies. Une fois devenu un pêcheur de bar expérimenté, on commence à s’intéresser aux pêches tropicales. C’est un processus logique, pour la mouche comme pour le lancer.  Il n’y a qu’à se balader sur YouTube pour comprendre à quel point la défense et la pugnacité des espèces tropicales dépasse tout ce qu’on connait en eaux tempérées, douces et marines, thonidés et sparidés mis à part.

Image
pêche Kérékjkj
Texte

C’est grâce à un client et son épouse devenus amis, que je suis retourné aux Bijagos, exactement 29 ans après y avoir posé mes mouches pour la première fois à l’occasion d’un reportage, puis y être retourné l’année suivante avec un groupe d’amis, aussi fêlés que moi. Philippe et Stéphanie Porcher, pour les citer, étaient venus faire un petit séjour de pêche dans les Monts d’Arrée en mai 2021 pour se consoler de l’annulation de leur séjour annuel en Irlande pour cause de Covid-19.

Ils me parlent de Kéré et de l’organisation de Laurent et Sonia Durris, les propriétaires de ce petit îlot privé d’1,7ha situé au Nord-Ouest de l’archipel, entre les îles de Caravela et Carache, où ils retournent chaque année depuis 15 ans. Leurs yeux brillent.

Connaissant mes compétences en matière de mouche en mer et mon expérience de l’archipel, Philippe m’explique que bien que quelques moucheurs y aient obtenu des résultats plus qu’encourageants, tout restait à faire pour développer la mouche à Kéré et faire connaître ce véritable paradis. D’autant que Laurent, parfaitement conscient de l’énorme potentiel de son éden, souhaitait y développer cette technique et la faire passer au statut de plan A alors qu’elle n’était jusqu’alors qu’un plan B, ou C, après les pêches aux leurres et aux appâts. Il lui fallait l’expertise d’un professionnel de la mouche en mer pour confirmer ses espoirs. Nous devions nous rencontrer.

Image
pêche Kéré
Texte

Philippe m’envoie rapidement un flot de photos et quelques vidéos récentes et j’ai très vite une envie irrépressible d’y organiser des séjours guidés.

Ayant déjà une solide expérience de l’archipel avec une canne à mouche, je n’étais pas confronté à un terrain totalement vierge, mais plus d’un quart de siècle s’était écoulé depuis mes derniers séjours, le secteur pêché n’était plus le même et les populations de poissons pouvaient s’être amoindries en raison de la conjonction des facteurs anthropiques et climatiques…
Les infos glanées ci et là me permettaient de partir confiant, cette partie Nord-Ouest de l’Archipel subissant une pression de pêche professionnelle moindre si bien que les richesses halieutiques semblaient toujours exceptionnelles. 

Tout restait encore à découvrir et valider en matière de mouche à Kéré en fonction des poissons recherchés et du type de pêche pratiqué : les bonnes mouches, les bonnes soies, les bonnes puissances de cannes, les bas de ligne, la stratégie de pêche en fonction des marées et des conditions météo, etc.  

Un premier voyage avec quelques bons et fidèles clients est organisé dans la foulée fin octobre 2021 et ce que j’y ai découvert a largement dépassé mes attentes.
Quel que soit votre niveau de lanceur et votre expérience de la pêche à la mouche en mer, vous trouverez votre bonheur à Kéré.

Image
pêche Kéré
Texte

La pêche autour de Kéré

L’île en elle-même jouit d’une position bénie des dieux puisque située à l’entrée d’un large chenal séparant deux très grandes îles habitées, Caravela au Nord et Carache au Sud, les courants de marées caressent les rives de Kéré deux fois par jour. Comme on peut l’observer sur la photo aérienne, elles sont majoritairement rocheuses sur les 4/5 du pourtour de l’îlot, seule la façade sud-ouest est sableuse. C’est là que se situent la plage, le petit port et c’est vers cette rive plus douce et abritée que sont orientées les infrastructures, le restaurant et les bungalows.

Face à la plage, vers le Sud-Ouest et le canal de Ninquim qui sépare Caravela de Carache, s’étend un immense banc de sable qui rajoute à Kéré des territoires de jeu supplémentaires.  A basse mer, il est séparé de la plage de Kéré par un chenal d’une cinquantaine de mètres de large tout au plus dans lequel s’engouffrent les courants de marées, flot ou jusant. Quelques minutes de pagayage permettent de l’atteindre et d’accéder à d’autres hot spots pour la mouche. On en parlera plus loin.

Image
pêche Kéré
Texte

Lever avec le jour, la magie de Kéré hypnotise immédiatement l’amoureux de Nature car nous sommes ici au cœur d’un écosystème protégé où vivent de nombreuses espèces d’oiseaux, au premier rang desquelles les très gracieuses tourterelles à collier, leur roucoulement est un très doux réveil matin. Petit détail qui a son importance, il n’y a ni serpent ni “bêtes qui piquent” sur Kéré, une rareté en Afrique de l’Ouest. Laurent et son équipe attachent un soin particulier à proscrire et éliminer tout point d’eau stagnante sur l’îlot, et élimine du même coup les moustiques dont le contingent est ici quasi inexistant, en comparaison avec d’autres îles de l’archipel où j’avais séjourné autrefois.

Lorsque l’aube coïncide avec la pleine mer, le rythme cardiaque du moucheur passionné s’emballe inévitablement à la vue quasi quotidienne de très spectaculaires chasses de carangues hippos, les plus grosses, qui mènent la vie dure aux bancs de mulets refugiés dans les anses de l’île. Ces chasses peuvent être également l’œuvre des nombreux barracudas qui chassent à l’affût tout autour de Kéré et les prédateurs valident souvent leur prédation au ras du bord. J’ai vu des chasses de dingue à moins de 10 mètres de ma terrasse !

Image
pêche Kéré
Texte

Parlons donc de la pêche autour de Kéré qui pourrait à elle seule justifier le voyage tant la variété des situations de pêche offertes et des espèces susceptibles de se jeter sur votre mouche est grande.

En dehors de l’aube et du crépuscule, moments à ne jamais négliger avec une canne de puissance 10 et des mouches volumineuses qui bougent de l’eau et déclenchent l’appétit des chasseurs en maraude, il faut coller aux meilleurs moments de la marée pour faire plier le carbone de manière régulière.

La deuxième moitié du flot, soit le matin jusqu’à 12/13h ou l’après-midi jusqu’au coucher du soleil, sont les moments les plus prolifiques. La conjonction des courants fait se rapprocher du bord les poissons fourrages, particulièrement sur la plage, et ses deux extrémités l’une donnant vers Carache, l’autre vers Caravela. Ils sont parfois tellement nombreux qu’on observe un véritable mur d’alevins verdâtres plutôt translucides poussés vers la rive par les prédateurs. Au premier rang desquels un banc d’élops ou Lady Fish (Elops senegalensis), unique autre membre de la famille du tarpon, qui est quasiment à résidence devant Kéré. Il s’agit de superbes poissons de sport qui sont parfaits, avec un matériel de puissance 7/8, pour connaître ses premières émotions de moucheur en mer. Leur caudale extrêmement profilée et leur corps fusiforme explique une grande vitesse de nage. Leur taille varie d’une cinquantaine de centimètres à plus d’un mètre et ce sont des poissons très pugnaces et sauteurs. Les plus gros spécimens sont moins grégaires et plus rares autour de Kéré.

Image
pêche Kéré
Texte

Au milieu du banc d’élops, d’autres espèces se joignent à la curée, spécialement les carangues sénégalaises (Caranx senegallus), les carangues pompano (Alectic ciliaris) et les maquereaux bonite (Scomberomorus tritor), sans oublier les carangues hippos (Caranx hippos), la liche (Lichia amia) et l’otholite épais (Pseudotolithus brachygnathus) qui, à la faveur d’une luminosité déclinante, peut s’aventurer dans peu d’eau pour chasser. D’autres espèces quittent leur habitat préférentiel rocheux pour participer au festin : carpes rouges (Lutjanus agennes) et mérous sont aussi de la partie. J'ai aussi inauguré une nouvelle espèce à la mouche, une sorte de flétan à dents...Camérélouse ou Perpeire Lisse (Citharichthys stamflii).

Philippe m’avait parlé de ce poisson dont il était convaincu qu’il était prenable à la mouche de par son caractère chasseur. J’ai cru à un énorme coup de chance quand j’ai pris le premier spécimen en 2021. Pourtant, j’ai réédité la bizarrerie en 2022 avec deux autres poissons capturés à dix minutes d’intervalle sur la plage de Kéré. Le combat n’est pas inintéressant mais il faudrait les cibler spécifiquement avec du matériel plus léger qu’une canne de 10 ! En revanche le Clouser en taille #2/0 ne leur avait pas fait peur !

Pas moins d’une grosse douzaine d’espèces toutes aussi pugnaces les unes que les autres peuvent s’emparer de votre mouche à une quinzaine de mètres de votre position. 

Image
pêche Kéré
Texte

La problématique est que parmi les espèces que je viens d’énumérer, certaines ont des dents acérées et nécessitent le recours à des avançons anti-dents (barracudas, maquereaux bonite en tête de liste) mais surtout il est fréquent qu’à cette grande tablée communautaire (il ne fait pas bon être un alevin ou un mulet autour de Kéré), se joignent des individus beaucoup plus gros et là les cannes de puissance 7/8, même avec un moulinet doté d’un très bon frein, ne suffisent plus.

Pour avoir une vraie chance de connaître une issue favorable, le combat avec tout poisson de plusieurs kilos, nécessite le recours à un matériel de puissance 9 à 10.
L’éternel dilemme lorsqu’on opère sur la place et ses abords lors des moments de frénésie alimentaire est de choisir entre le quantité  et la qualité. Celui qui veut prendre beaucoup de petits à moyens poissons prend inévitablement le risque de se faire “spooler” sans retour s’il est connecté avec une vraie carangue au sens dimensions du terme, c’est-à-dire 4 kilos et plus, ou de se retrouver “tanqué” au fond car la belle carpe rouge ou le beau mérou a décidé de rentrer au bercail !

Ce n’est pas la fin du monde mais au bout de dizaines de “petits” poissons, certes très plaisants à capturer et combattre, nos prétentions augmentent, ce qui est parfaitement légitime. Etre attelé c’est sympa, mais ça l’est beaucoup plus quand on peut admirer, toucher, caresser, soupeser, photographier puis relâcher une belle carpe rouge ou une jolie carangue…

Tout dépend des attentes et de l’expérience de chacun. Mon rôle de guide est évidemment de privilégier le plaisir et la pratique de mes stagiaires, mais dès que l’aptitude à lancer régulièrement une soie de 9 ou 10 avec régularité à une bonne quinzaine de mètres devient réalité, j’encourage ceux qui le souhaitent à passer le cap.

Image
pêche Kéré
Texte

En toute objectivité, un moucheur ayant l’habitude de manier des cannes de puissance 6 à 7 pour le réservoir ou de 8 à 9 pour le bar et/ou les carnassiers, avec une maîtrise moyenne de la double traction, pourra rapidement passer à une canne mer pour soie de 9 à 10.

Quelques ajustements dans le tempo et le chargement de la canne, la familiarisation avec le panier de lancer et on passe en mode “warrior”. Rien de douloureux dans ce cas. C’est juste la façon de gérer les poissons qui change.
Pour toutes les pêches du bord, en wading, l’action de pêche est classique. On s’avance dans l’eau de manière à gagner quelques précieux mètres, mais en gardant une position haute par rapport à sa cible. Tout le monde le sait, lancer une mouche, parfois lestée (clousers) proprement et délicatement avec de l’eau au plexus est utopique. L’idéal est d’avoir le panier placé au niveau de la hanche et l’eau jusqu’à l’entre-jambe. De cette manière vous pouvez faire évoluer votre soie avec une boucle étroite haut derrière vous, ce qui permet de bien utiliser le potentiel de flexion de la canne, de générer une haute vitesse de transfert de la soie et du bas de ligne, de minimiser le nombre de faux-lancers et d’atteindre une bonne distance sans trop d’efforts.

Image
pêche Kéré
Texte

La configuration des postes et l’action de pêche ont le plus souvent un dénominateur commun : une côte sableuse parsemée de roches bien abrasives longée par un courant nourricier plus ou moins fort en fonction de la marée. Les récifs abritent de nombreux petits poissons et crustacés qui attirent les prédateurs.

L’objectif est de faire descendre la mouche, grâce à son poids, et à la soie, sous le banc de poisson fourrage qui fait cohésion en surface. Les apprentis chasseurs, élops principalement, sont dans la couche supérieure, mais les plus gros prédateurs sont beaucoup plus furtifs et attaquent en venant du fond, sans qu’on ait pu visuellement déceler leur présence. C’est souvent la stratégie des plus belles carangues et carpes rouges.

Image
pêche Kéré
Texte

On lance le plus loin possible, on laisse couler tout en contrôlant la descente de la mouche, scion dans l’eau, en ménageant l’angle le plus ouvert possible entre la canne et la soie, pour une sensibilité optimale, puis, quand on estime avoir atteint la bonne profondeur de pêche, au bout de quelques secondes tout au plus, on récupère la soie par de longs strips progressifs, en ménageant de courtes poses afin permettre à la mouche de basculer vers le bas.

La touche est sourde et brutale. On peut avoir l’impression d’avoir accroché le fond (ça arrive aussi !). La conduite à tenir est précise. Ne rien donner au début ! Il faut empêcher la carangue de prendre de la vitesse, surtout si le courant est puissant. Pour les poissons de roches de type carpes rouges (snappers) et mérous, il faut les décoller du fond pour les empêcher de retourner dans la cavité de leur caillou préféré. C’est ce que j’appelle le mode guerrier. La principale erreur est de vouloir mettre trop vite la soie sur le moulinet. On perd la tension, surtout lorsque le poisson décide de revenir vers le pêcheur, et ne manque alors pas de se décrocher ou de réaliser un joli slalom entre les roches : les meilleurs bas de ligne n’y résistent pas toujours.

Image
pêche Kéré
Texte

Le pré-réglage du frein et son contrôle en cours de partie de pêche sont primordiaux car un frein mal réglé c’est un bourrage bobine potentiel mais surtout plusieurs dizaines de mètres de soie qui s’échappent inutilement. S’il y a un peu de courant, qu’on soit à la descendante ou à la montante, la moindre carangue de 5 kg et plus vous faussera compagnie en quelques secondes. Les carangidae, grâce à la hauteur de leur corps, couplée à leur extrême vélocité, savent parfaitement s’appuyer sur le courant pour s’enfuir hors de portée de combat. J’entends par là que ce type de poisson, lorsqu’on ne peut pas le suivre en bateau et lui tirer dessus dans un axe vertical, devient très vite incontrôlable. Au-delà de 40 à 50 mètres de backing sortis, soit une longueur de ligne de 70 à 80 m séparant le poisson du pêcheur, les choses sont très mal embarquées, et je ne vous parle pas de la catégorie des carangues hippos de 10 kg et plus. Lors de mes premiers voyages dans les Bijagos, j’ai connu quelques expériences amères de grandes frustrations. Il est vrai que le matériel de l’époque n’avait pas la performance de celui d’aujourd’hui mais une très grosse carangue reste un immense challenge pour le pêcheur à la mouche en mer.

Image
pêche Kéré
Texte

De nombreux autres défis s’adressent aux moucheurs en pêchant du bord autour de Kéré.
Pour les couche-tôt, la traque des nombreux barracudas embusqués à l’abri des roches immergées pour y chasser les mulets est véritablement passionnante. Ces magnifiques poissons de sport (attention aux doigts lors du décrochage) peuvent peser plus de 10 kilos. Longue mouche filiforme en tailles 3/0 à 6/0 et bas de ligne anti-dents en titane ou acier, le tout récupéré à toute vitesse en rolly polly, sont les clés du succès.

La pêche de nuit peut également réserver de très belles surprises en opérant avec des soies plongeantes et récupérant des mouches sur les fonds sableux : les otolithes, de la famille des maigres, sont très actifs la nuit.

Image
pêche Kéré
Texte

La pêche en bateau

Depuis 2022, nous opérons avec 2 bateaux spécifiques pour la pêche à la mouche (pas comme les skiffs des Caraïbes) idéaux pour 2 pêcheurs chacun avec un franc-bord pas trop haut et des moteurs hors-bord silencieux de 100 CV/4 temps. Chaque bateau est opéré par un marinheiro qui parle français (et que nous avons formé pour répondre aux besoins spécifiques des pêcheurs à la mouche : dérives moteur coupé, approches en contournant les chasses, etc.)

Les bateaux permettent d’atteindre les meilleures îles alentours dans un rayon d’une grosse heure de navigation maximum (selon les coefficients de marée et la force du courant), aux bancs de sable les plus productifs et non des moindres, de pêcher efficacement les chasses qui se produisent en pleine eau, entre les îles ou d’approcher des poissons en chasse, inatteignables depuis le rivage.

A l’aide de cannes puissantes de classe #11 ou #12, de soies très plongeantes, et de grosses mouches, on peut également envisager de prospecter les abords de récifs connus pour leur grande richesse en diverses espèces de poissons. La fameuse “roche magique”, à quelques minutes de navigation de la plage de Kéré, mériterait qu’on y descende des artificielles.

Image
pêche Kéré
Texte

C’est en bateau que les chances de faire mordre et de vaincre une grande carangue à la mouche sont les plus grandes. On accède tout d’abord à des secteurs généralement fréquentés par ces poissons à un moment précis de la marée et connu des marins et du guide. Il s’agit souvent de pointes rocheuses dont on découvre la structure à marée basse, le début de la marée montante étant souvent le meilleur moment pour y poser une mouche.

Je pense particulièrement à la pointe d’Ampicha, au nord-est de Carache, où nous avons touché plusieurs très belles carangues en pêchant entre les têtes de roches, idem sur la pointe nord-est de Caravela ou dans les roches et bancs de sable du nord de la magnifique île d’Unhocome (Illha de Unhocomo), la plus à l’ouest de l’archipel, que l’on rejoint après une grosse heure de navigation.

Image
pêche Kéré
Texte

Les journées de pêche autour des îles plus ou moins lointaines se font lorsque la conjonction entre conditions météo clémente, c’est-à-dire mer calme avec peu de vent, et coefficients de marées favorables, sont garanties.
C’est une expérience immersive au cœur d’une nature encore vierge. On accède à des kilomètres de plages de sable clair, des flats marins, des criques aux eaux claires, encadrées de pointes rocheuses, des estuaires, des sorties de bollonds, des bancs de sable à perte de vue, le tout baigné par les eaux niches en nutriments de l’océan Atlantique : un régal pour les yeux et un terrain de jeux sans limite pour les pêcheurs à la mouche.
 On concentre surtout l’action de pêche sur les espèces les plus emblématiques, carangues et carpes rouges, mais pour celui qui veut sortir des sentiers battus, il y a d’innombrables autres espèces à capturer à la mouche : poissons de roches de toutes sortes, poissons plats chasseurs.

Image
pêche Kéré
Texte

Quand venir pêcher à la mouche à Kéré

Le mois de Novembre, période à laquelle j’organise mes séjours guidés exclusifs, marque le début de la saison sèche. C’est la meilleure période pour séjourner à Kéré car même en cas de fortes chaleur, on bénéficie d’une agréable brise qui, en l’absence de nébulosités, permet de supporter un soleil de plomb.

C’est également la période où la biodiversité faunistique est la plus abondante et visible, ce qui permet d’inoubliables visites et randonnées d’écotourisme, autre grande spécialité de Kéré. Nous ne sommes pas ici dans un village réservé à d’irréductibles pêcheurs. On peut y venir en famille et profiter des infinies possibilité de Kéré et de l’archipel.

Image
pêche Kéré
Texte

Les Bijagos possèdent en effet une nature incroyablement variée (savane, palmeraies, plages de sable blanc, mangroves, forêts tropicales, …) et une biodiversité unique au monde. C’est pourquoi en 1996, l’ensemble de l’archipel a été classé comme réserve de biosphère par l’UNESCO et deux parcs nationaux ont été créés : le parc national d'Orango et le parc marin de João Vieira et Poilão.

La réserve d'Orango abrite des hippopotames marins, endémiques des Bijagos. La réserve de Poilão est le premier site pour la ponte des tortues en d'Afrique. C'est un spectacle magique de voir pondre des tortues par dizaines, de voir les bébés tortues s'élancer avec courage vers la mer.

Image
pêche Kéré
Texte

Bien choisir son matériel

Cet article a pour objectif de vous faire découvrir une destination méconnue, pour un budget abordable, avec une empreinte carbone “raisonnable” et totalement compatible avec le bonheur de vos accompagnants, femmes et enfants. Je n’oublie pas que c’est Madame qui peut être pêcheuse à la mouche.

Je ne vais pas vous donner une liste exhaustive du matériel à prévoir, car cela justifierait l’écriture d’un article spécifique consacré au sujet. Je sais qu’on attend pourtant d’un guide de pêche qu’il donne des références, des noms !Dans les grandes lignes, voilà ce qu’il ne faut pas oublier pour réussir un séjour à Kéré.

Image
pêche Kéré
Texte

La canne et le moulinet

Comme décrit plus haut, tout dépend de votre niveau de lanceur et de vos attentes quant à la taille des poissons que vous voulez cibler.

Pour les pêches légères, une bonne canne légère de puissance 8 à 9 permet de s’occuper efficacement de la plupart des poissons pendant jusqu’à 2/3 kilos. Une mise au point nécessaire : sur ce type de matériel une carpe rouge de 3 bons kilos se défend et tire aussi fort si ce n’est plus fort qu’un bar européen de 7/8 kg. Et je pèse mes mots. J’utilise ma Bay of Morlaix II 9’0”#8/9 ou une Guideline LPX Coastal 9’0”#8

Pour les pêches moyennes à mi-lourdes, celles que je pratique quand je pêche avec mes clients, j’utilise une canne de puissance #10. La Brittany Fly Fishing Sea Bass & Pike Nine 9’0” #9/10 dans sa version customisée pour la mer (anneaux titanium) et la Guideline LPX Coastal 9’0”#10 ont largement fait leurs preuves lors de mes deux derniers séjours à Kéré, soit plus de 4 semaines de pêche intensive au total.

Pour ceux qui ont une technique de lancer appropriée et l’habitude de manier des cannes ultra-puissantes, on peut prévoir une canne de #12. La Guideline LPX Coastal 9’0”#12 est ma préférée car elle reste légère pour une soie de 12.

Image
pêche Kéré
Texte

En matière de moulinets, les critères de choix sont le traitement anti-corrosion, la puissance et progressivité du frein, la vitesse de récupération (le ratio au tour de manivelle), la légèreté et bien entendu la contenance.
Sachant que tout poisson qui vous prend plus de 100 mètres de backing est souvent un poisson perdu, les moulinets qui acceptent 400 mètres de backing en plus de la soie ne sont pas prioritaires.
J’ai opté pour des modèles suffisamment fiables et légers pour qu’ils équilibrent bien la canne et permettent de lancer avec plaisir durant de longues heures, sans vous procurer tendinites et autres épicondylites.
J’aime beaucoup mes Lamson Speester 9+ HD et en 2023, j’ai aussi eu totale satisfaction avec les Guideline Halo #79DH et #911DH

Image
pêche Kéré
Texte

Une soie adaptée, la véritable clé du succès

Pour les débutants en mer, on aurait tendance à conseiller une soie flottante pour les tropiques comme la Chard's Tropical Punch d’Airflo par exemple.
Tout aussi facile à lancer, voire plus facile et tellement plus efficace en pêche, mon choix s’est clairement arrêté sur les soies flottantes à pointe intermédiaire transparente. Elles permettent de mettre rapidement les mouches au bon niveau et d’obtenir une action de pêche efficace sur toute la distance de récupération.
J’adore la Scientific Anglers Sonar Titan Tropical Clear Tip que j’utilise en #8, #9 et #10, increvable. L’Airflo Ridge Tropical Clear Tip Long est également un bon choix.

Pour les pêches profondes avec des cannes “lourdes”, on peut prévoir des modèles à pointes plongeantes plus ou moins rapides (SA Sonar Big Water Taper Intermediate WF-450-F/I, Sonar Titan Big Water Max Sink WF-11/13-500 grains & WF-12/14-600 grains)

Image
pêche Kéré
Texte

Les bas de ligne

Dès lors qu’on risque d’être confronté à des poissons dentus, je considère qu’il est déraisonnable de descendre en dessous de 50 lbs (.63 mm) en shock tippet (avançon anti-dent).

Selon les poissons recherchés : Butt en fluorocarbone SW en 40 lbs (.48 mm), 50lbs (.63 mm). 60 lbs (.68 mm) ou 80 lbs (.76 mm). Pointe boucle dans boucle en 50 lbs (.53mm), 40 lbs (.48 mm), 30 lbs(.48 mm), 26 lbs (.43mm), 20lbs (.38 mm) et 16lbs (.33 mm) selon les cas + shock tippet en Fluorocarbone Fluorocarbone (50, 60, 80 ou 100lbs)

Image
pêche kéré
Texte

Les mouches et poppers

La principale qualité qu’une mouche doit avoir pour la pêche autour des îles des Bijagos est la solidité des hameçons et la résistance des matériaux car certaines espèces ont la dent “dure” voire coupante, et des mâchoires puissantes. Les fibres synthétiques sont préférables aux fibres naturelles, beaucoup plus fragiles. Rien ne sert de partir avec trop de modèles. On perd beaucoup de temps à choisir et on s’encombre inutilement. Pour mieux pêcher, il n’est pas utile de prévoir plus d’une dizaine de modèles. Il est en revanche primordial de prévoir de la réserve dans les variantes de couleur et de taille.

La mouche avec laquelle je fais prendre la grande majorité des bars lorsque je guide en Bretagne s’avère être aussi efficace aux Bijagos en version 2/0, j’ai nommé le Slinky Clouser (FMF). On ne le redira jamais assez, l’intérêt des mouches de type Clouser est qu’elles descendent plus vite qu’une mouche classique à la bonne profondeur et qu’elles pêchent pointe de l’hameçon vers la surface et accrochent ainsi moins volontiers les aspérités du fond.
Plus facile à lancer, les
FMF Salty Baitfish en tailles #2 & 1/0 en coloris chartreuse, anchovy et mullet et les FMF Los Roques Minnow gray et green en tailles #2

Pour les pêches des grosses carangues en pleine eau, sur chasse ou à l’aveugle sur postes ou sur les bancs de sable, un modèle a été particulièrement efficace, surtout par conditions ensoleillées : FMF Magnetic Minnow Blurple #2/0, 4/0 et 6/0. Egalement validées les versions tan et chartreuse  du FMF Magnetic Minnow en #2/0 et 4/0

Ceux qui aiment pêcher au popper ont de quoi se régaler à Kéré, sachant tout de même qu’on loupe la grande majorité des poissons avec des poppers mouche, bien moins armés que les leurres. Mais c’est une pêche particulièrement ludique. A noter que pour ces mouches de surface, il faut utiliser du nylon qui coule moins que le fluorocarbone.

Image
pêche kéré
Image
pêche Kéré
Texte

Les accessoires (à minima) et vêtements

  • Pince long mors pour écraser les ardillons, décrocher les poissons dentus et couper les nylons/fluoros épais et les avançons en acier.
  • Un bon panier de lancer léger et perforé.
  • Un sac de type banane étanche pour transporter les boîtes à mouches, les bobines de fil, les outils, un appareil photo/téléphone portable et autres accessoires (mon choix : Dry Creek Z Hip Pack Simms).
  • J’ai définitivement adopté les vêtements anti-UV de la tête aux pieds ce qui ne me contraint pas au badigeonnage de crème solaire toutes les deux heures et me permet de guider et pêcher dans un confort optimal.
  • Une paire de bons gants de pêche renforcés dans la paume est indispensable, si possible traité anti-UV. Il faut au moins se protéger les doigts concernés avec des doigtiers de stripping.
Image
pêche kéré
Texte

Chaussures de wading

En dehors de la pêche en bateau, on marche beaucoup aux Bijagos, sur les plages, sur les rochers, dans le sable, parfois la vase. Comme pour la randonnée, la cheville doit être parfaitement tenue et la semelle résister à la perforation (dard de raie, etc.). Certains habitués conseillent l’emploi de chaussures de wading bon marché avec semelles en feutre, ce qui semble être le moins glissant sur les rochers mouillés. Pour ma part j’utilise des chaussures spécifiques de flats qui me donnent entière satisfaction.

Image
pêche Kéré
Texte

Infos utiles :

En partenariat exclusif avec Laurent Durris (M'Îles vagues de découvertes) et Pollen Voyages, tour-opérateur des plus sérieux basé à Brest (Garantie APST Lic. IM029100010), j'organise à nouveau des séjours guidés pour 4/5 pêcheurs à la mouche en Novembre 2023. 7 jours complets de pêche guidée et encadrée/ 8 nuits sur place. Les places sont limitées et les accompagnants non-pêcheurs bienvenus. 

Les lecteurs intéressés peuvent me contacter : info@brittanyflyfishing.com

Renseignements complémentaires :

https://www.brittanyflyfishing.com/voyages-de-peche-a-la-mouche-guides/ile-de-kere-archipel-des-bijagos/

https://youtu.be/iLKHLQeV3C8

Image
pêche kéré
Géovan

A propos de l'auteur

C’est dans les Monts d’Arrée, en Finistère, que vit Philippe Dolivet.

Racines de sa profonde passion pour la pêche à la mouche, il est fortement attaché…