Mouche sèche : comment limiter les refus ?

gobage sèche

Dans le vocabulaire du pêcheur à la mouche , le mot “refus” est un terme récurrent qui, dans l’ensemble, désigne une situation de pêche au cours de laquelle une truite supposée en activité reste insensible à nos avances. Par ailleurs, au cours de cet article, je ne parlerai que de la truite et de sa pêche à la mouche en rivière. J’occulte délibérément la pêche de l’ombre qui est un poisson qui “refuse” aussi beaucoup (et sans doute pour de plus mystérieuses raisons que la truite) car je ne dispose pas de l’expérience suffisante auprès de ce poisson pour oser émettre un avis crédible.

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Différents types de refus et contextualisation 

Il existe bien évidemment plusieurs types de refus, je ne sais d’ailleurs même pas si le terme de “refus”est vraiment bien approprié pour tous les cas que je vais lister ci-dessous...

Après avoir essuyé les premiers refus, voici quelles sont les questions à se poser et éventuellement leur réponses :

1- Est-ce un gobage “accidentel”, le fait d’un seul poisson ?

Il nous arrive à tous, surtout les jours où la rivière est très calme et la pêche mauvaise, d’être surpris par un gobage isolé et qui ne se répète pas. Très souvent il s’agit d’un gobage très peu discret , qui ne laisse planer aucun doute quant à sa nature.

Si ce gobage à lieu près de nous, il est possible que la truite ai “senti” notre présence en montant en surface et se soit enfuie...  Ou bien alors est-ce seulement le caprice d’un poisson ayant succombé à une quelconque proie opportune.

Si l’on a eu la chance d’apercevoir et d’identifier le type d’insecte pris, nous aurons peut-être la possibilité de capturer ce poisson à l’aide d’une imitation compatible avec le-dit insecte… il faut essayer sans tergiverser!

Insister si le poisson ne se manifeste plus après de brefs essais me semble être une perte de temps.

2- Est-ce un poisson qui gobe régulièrement?

Il s’agit du cas de figure le plus facile (sur le papier), d’autant plus si l’on peut avoir une petite idée du menu du jour. En cela, l’expérience, la connaissance de la saisonnalité et du cycle des insectes sont des atouts précieux.

Notre premier réflexe avant de tenter le premier lancer, sera de se placer de la meilleure manière possible afin que notre présence n’interfère pas avec l’activité du poisson tout en optimisant au mieux  la distance d’attaque… ce qui signifie suffisamment loin pour ne pas perturber la truite et suffisamment près pour être dans les meilleures dispositions pour observer tous les détails de la scène (souvent vecteur d’informations capitales!) ainsi que pour proposer une présentation la plus précise et la plus adaptée possible.

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placement pêcheur
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Bien se placer est une étape indispensable pour limiter les refus... ©Benoît Rionde
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3- y a-t-il plusieurs poissons sur le poste?

Imaginons la scène, nous sommes sur une petite “plage” et  une demi-douzaine de truites se manifestent par des gobages plus ou moins réguliers... vision à la fois excitante et apaisante (paradoxe que seuls les pêcheurs peuvent comprendre!), un succédané de paradis.

Reprenant tous les paramètres du cas n°2, nous devons être encore plus méthodiques puisque les cas sont ici multiples. Selon le but à atteindre, la stratégie doit être en rapport :

La logique voudrait que l’on sollicite en priorité les poissons situés le plus en aval et remontant progressivement vers le poisson situé le plus en amont, surtout si on nourrit l’ambition de “tous les prendre”... si tant est que les premières prises (ou décrochages!!) ne mettent pas tout ce petit monde aux abris.

En revanche, on peut prendre le parti de se concentrer sur une seule cible si le poisson nous paraît plus intéressant ou plus gros, et ceci au détriment des autres captures potentielles si le poisson en question est mal placé ou tout bêtement en tête du poste.

Il est fréquent que les poissons les plus modestes soient situés sur la partie aval du poste, la présentation y est souvent plus difficile et ce sont les individus les plus prompts au refus. Les plus beaux sujets tiennent souvent la tête du courant, à l’exact compromis de la veine d’eau où la nourriture est la plus profuse et la proximité de leurs caches.

Ces truites là, privilégiées par nombre d’entre nous, refusent moins que les autres si on ne fait pas d’erreur grossière. Soyons surtout attentif au fait d’avoir une présentation impeccable et d’être précis dès le premier lancer, nous n'aurons guère l’occasion de nous y reprendre à plus de 2 ou 3 fois...

4- Les gobages se manifestent-ils par séquences?

Vous l’avez peut-être aussi observé, il arrive régulièrement que la truite gobe par séquence.

Exemple : vous observez une série de 3 gobages en 45 secondes puis une ou 2 minutes sans gobages et à nouveau une nouvelle séquence de 3 ou 4 gobages en moins d’une minute et ainsi de suite…

Plus étonnant encore : s’il y a plusieurs poissons, les “passages à vide” semblent eux aussi être soumis à synchronisation, c’est plutôt déroutant. J’ai l’impression que cette attitude des truites est liée au rythme de l’émergence en cours mais je n’en suis pas du tout sûr, certains faits nous échappent forcément. Je ne saurais donc expliquer le phénomène de façon rationnelle, d’autant plus que bien souvent l’on observe les mêmes insectes dériver sur le poste lors de ces mêmes “passage à vide”.

Dans cette situation le refus est la plupart lié à un problème de tempo, il me paraît judicieux de respecter un temps d’arrêt et de ne pas fouetter lors des temps morts. Essayons de proposer notre mouche directement après le 1er gobage d’une nouvelle séquence. Souvent le poisson monte.

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pêche truite
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Quand les gobages sont séquentiels, présentez au bon moment !
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5- Quel est le style de gobage auquel nous avons affaire?

Selon les circonstances, nous remarquerons que les truites ne gobent pas toujours de la même façon. Le gobage, dans sa forme, peut revêtir des styles et des rythmes particulièrement différents, ce qui nous renseigne sur le type de proie du moment et la stratégie qui en découle.

Voici quelques cas d’école (liste volontairement caricaturale, subjective et non exhaustive):

Gobage classique en forme de haricot (ou de rein)

Il s’agit de la montée dite “classique”, typiquement celle produite par la Large Olive, la Medium Olive et la BWO. Les gobages se manifestent à rythme régulier.

Si dans ces circonstances, ce même gobage est accentué par un remous bien marqué sans que l’on aperçoive l’insecte il est plus que probable que ce gobage soit induit par la prise de la nymphe montante (cas assez récurrent en présence de Baetis Rodhani). Dans ce cas, l'emploi d'une nymphe de type Skues est le mieux indiqué.

Gobage “tête et queue”

C’est un style de gobage que l’on peut rencontrer tout au long de la saison mais plus particulièrement l’été dans les deux heures qui précèdent le coup du soir ainsi que lors du coup du matin.

On observe alors une forme de gobage un peu allongé, effilé, qui est produit par trois points : museau, nageoire dorsale et pointe de la nageoire caudale. Ceci est le gobage type qui nous indique la prise de proies flottant très bas sur l’eau : certains types d’émergentes, subimagos mal-éclos ou flottants sur le côté...et surtout imagos morts (spents), notamment l’été.

Gobage rapide et nerveux

On assiste régulièrement à ce style de gobage au printemps et par “mauvais temps” dans la même temporalité que la montée classique sur la Medium Olive. Il y a une forme d’urgence dans ce gobage. Comportement typique de truites en quête de l’Iron Blue (Baetis Niger, Alainites Muticus, etc…), éphémères très discrets mais déterminants pour le poisson.

Gobage violent et aléatoire

Parfois même sonore, ce gobage nous surprend!

Il s’agit le plus souvent de la prise d’une proie capable de s’échapper, les trichoptères adultes regagnant la berge en courant sur l’eau en font souvent les frais. Ce gobage se produit également au moment où les femelles (de trichoptères) déposent leurs oeufs, c’est toujours surprenant et spectaculaire.

Ce sont parfois aussi des plécoptères qui sont happés de cette manière au moment ou ils prennent leur envol.

Gobage discret en forme de pincement

Gobage lent et discret formé par la pointe du museau, on le repère dans les calmes et les petites poches d’eau. Il nous indique la prise de proies de très petite taille et plus ou moins inertes, le plus souvent des chironomes, mais parfois aussi des fourmis.

Gobage dans la vague

Gobage discret, précis et fugace qui se produit au sommet de la  vague des courants principaux, il est motivé par la ponte ou retombée d’une “mouche de courant”(imago d’Heptageneiidae).

Beaucoup de pêcheurs passent à coté de ce genre d’activité.

Gobage en forme de clapotis

Dans ce cas bien précis, on voit la truite prendre “sur le côté”, à la perpendiculaire de l’axe du courant, c’est très distinct car bien souvent on aperçoit la tête du poisson sortir de l’eau dans un élan furtif. Cela se passe la plupart du temps sur des “lisses” plus ou moins rapides et sur les “râpes”.

Cas très, très fréquent en Mai et Juin il nous indique presque à coup sur la prise de petits moucherons noirs (Empididaes, Simulidaes…) multitude volante au ras de l’onde à cette saison là. Le gobage est alors fréquent mais sans rythme particulier et ceci alors que ces insectes ultra nombreux volent au ras de la surface… il n’est pas exclu que les truites ne fassent le déplacement que dans le but d’en saisir plusieurs à la fois.

Il s’avère aussi que les Empididaes sont des insectes “chasseurs” et carnivores qui s’emparent de menus insectes et parfois même de petits éphémères. Il se pourrait bien que certaines truites aient une prédilection pour les individus affublés de leur proies.

Gobage “en saut de dauphin”

Ceci est un cas compliqué, un problème...

Il se produit souvent au printemps pendant une forte montée, ou on sent le poisson  bien excité. Je n’ai pas le souvenir d’avoir observé ce comportement par une eau d’étiage.

Si la plupart des truites ont un comportement classique, certaines d’entre elles sortent littéralement de l’eau à la façon d’un dauphin, s’emparant de la mouche au moment où celle-ci semble sur le point de s’envoler.

La truite prend la mouche en sortant entièrement de l’eau, mais bien plus souvent au moment ou elle replonge. Ceci est un cas que j’ai du mal à résoudre, il se pourrait qu’une mouche légère mais flottant bien haut sur l’eau masque un peu la misère…

J’ai notamment un souvenir d’échec cuisant de la saison passée lors d’une très belle émergence de l’Olive Upright pendant laquelle les plus belles truites s’entêtaient à systématiquement gober de cette manière les subimagos prêts à s’envoler et négligeaient presque toujours ceux qui dérivaient placidement… Allez comprendre!!

6- Avons-nous remarqué la présence d’un insecte en particulier?

Une fois arrivé sur notre lieu de pêche, il est de bon ton d’observer un peu ce qu’il s’y passe, au moins quelques petites minutes. Cette pause me semble nécessaire avant de choisir la première mouche que l’on attachera à la pointe de son bas de ligne. Selon le moment de la saison, la présence de certains insectes devrait s’imposer à notre observation et nous conduira à choisir une artificielle se rapprochant par l’aspect et la taille du type d’insecte le plus rencontré ce jour-là.

De cette habitude découle une diminution des refus ou d’indifférence de la part des truites. Ce réflexe n’est qu’un premier pas logique, certainement pas une solution...mais il ne coûte pas cher.

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gobage truite
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La forme du gobage peut être indicatrice du menu du jour ! ©Hervé Thomas
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7- Comment évaluer le niveau d’éducation du poisson sur le secteur?

Sur un parcours donné, on doit pouvoir définir 2 grandes caractéristiques qui vont être très importantes à considérer dans notre problématique des “refus”:

  • la richesse de la faune benthique (masse et diversité des insectes entrant dans l’alimentation de la truite),
  • le taux de pression de pêche de ce même parcours.

La combinaison à la hausse de ces deux paramètres détermine le niveau d’éducation du poisson et de sa méfiance à l’égard de nos mouches.

En somme, plus la rivière subit de pression halieutique et est riche en nourriture et plus le risque de se trouver confronté à des refus est grand (Exemples : Loue, Dordogne, Touvre...etc).

Nous devons tenir compte aussi de la densité de truites du parcours en question. Plus celle-ci sera élevée plus le phénomène de concurrence alimentaire viendra pondérer l’ensemble.

Caricaturalement les ruisseaux peu pêchés ainsi que les torrents d’altitude produisent des truites bien moins circonspectes devant nos artificielles. Pour ces 2 exemples il faut aussi ajouter que la profusion de nourriture en surface est circonscrite sur un temps court dans la saison, donc le reste du temps nos truites verront soit leur tempérament opportuniste renforcé, soit au contraire soumises à une très forte inactivité.

On peut à l’inverse considérer que les rivières s’écoulant dans des vallées plus “tempérées” permettront aux truites de se nourrir presque tout au long de l’année (et aussi de grossir plus vite!!) et abriteront des truites plus difficiles et plus pointilleuses vis à vis de nos mouches comme c’est le cas ici dans le piémont Pyrénéen mais aussi sur le bassin des Nives par exemple.

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pêche Carança
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En haute montagne, le milieu pauvre décuple l'opportunisme des poissons et limite les refus !
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8- Le poisson monte-t-il du fond ou reste-t-il en surface entre 2 gobages?

Lorsque notre truite est installée en surface, cela montre qu’elle est bien déterminée à se nourrir. Elle profite certainement d’un repas en continu qui dérive sous ses yeux. Théoriquement on devrait la prendre sans problème.

Si l’on est certain de ne point l’avoir dérangé et si elle refuse toujours c’est que notre mouche n’est pas convaincante…

Si la truite cesse de gober ou modifie son comportement c’est certainement notre présentation qui est alors en cause et non la mouche.

Je l’ai déjà écrit par ailleurs mais tant pis si je me répète : je suis partisan du changement de mouche raisonné lorsque je m’adresse à un poisson qui refuse. Le matraquer sans répit comme je le vois si souvent est vraiment contre productif, surtout l’été par eaux basses et sur les parcours très pêchés.

Ces dernières années il me semble avoir remarqué qu’une proportion grandissante des gobages auxquels j’assiste provient de poissons montant “du fond”.

... Est-ce dû à la raréfaction des “éclosions” massives ou une façon de moins s’exposer au regard des prédateurs? ... Je n’en ai aucune idée.

Les mouches qui seront le plus à même de faire réagir ces truites là seront souvent de taille moyenne voire de taille importante, leur présence est avérée mais moins constante en surface que dans le cas précédent.

Notons qu’il est relativement rare que la truite monte du fond pour se saisir d’une proie minuscule.

J’entend souvent dire que ce sont des poissons opportunistes. Si on réussit sans problème particulier c’est vraisemblablement le cas.

Cependant il est fréquent que ces poissons là demeurent impassibles devant nos imitations et ne daignent même pas se déplacer pour les refuser.  Ces derniers sont tout sauf opportunistes et seuls les insectes entrant “dans leur fenêtre de préhension” du moment sont les seuls susceptibles de les décider. C’est ici que le choix d’une imitation appropriée incluant dans son concept le stimulus bien senti (et bien compris!) qui déclenche l’attaque fera toute la différence.

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truite gobage
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©Hervé Thomas
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9- Le poisson a-t-il détecté notre présence?

Malgré nos précautions, bien souvent le poisson lui aussi nous à vu… ou pressenti. Nous partons donc avec un handicap dans ce cas précis.

Si notre présence provoque la fuite, c’est bien évidemment la fin de l’histoire avec ce poisson et il faudra passer au suivant.

A d’autres reprises, le poisson modifiera sa position.

S’il se déplace légèrement vers l’amont par exemple, tout n’est pas perdu. En revanche un poisson en surface alerté qui s’enfonce plus ou moins dans le sens de la profondeur est un signe assurément négatif. Je crois dans ce cas qu’il est souhaitable de temporiser un petit peu en attendant que cette truite reprenne confiance et nous oublie un petit peu avant de retenter notre chance.

Et puis il y a les cas où la truite semble bien consciente de notre intrusion dans son périmètre (en tout cas c’est bien l’impression qu’elle donne!!!) et qui continue à gober et à nympher comme si de rien n’était. Ce cas de figure n’arrive quasi-exclusivement qu’en milieu “riche” et à forte pression halieutique. Ces truites là se sont habitués à l’homme et ont “appris” à déjouer nos stratagèmes.

Me parlant de secteurs bien connus de la Loue en Franche-Comté, l’ami Cyril Bailly me confiait récemment que dans certains cas et par eaux basses, les truites, alors que très actives, demeuraient pratiquement impossible à prendre (sic) et ce malgré les présentations les plus délicates et les bas de ligne les plus fins… Et pour ceux qui connaissent le contenu de la boîte à mouches de ce garçon, vous savez qu’il n’y est pas allé avec un plumeau ! Cyril attribue ce fait à l’extrême sollicitation halieutique que subissent les truites de ces secteurs là.

Ces situations ne sont pas toujours aussi extrêmes et sont la plupart du temps vraiment passionnantes.

C’est un défi pour les pêcheurs confirmés qui savent qu’aucune faute ne leur sera tolérée : approche, présentation, maîtrise de ses nerfs, choix de la mouche… tout devra être parfait pour espérer un minimum de résultat.

Voici un autre cas un peu agaçant : celui des truites qui gobent à l’ultime limite de nos capacités de lancer (enfin...tout du moins des miennes!) et lorsque nous parvenons enfin à présenter correctement notre mouche, ces truites marquent une légère pause pour se remettre à gober quelques mètres plus haut. Un peu comme si elles jouaient avec nous, ces poissons semblent nous narguer !!!

Mon vieil ami André Melotto pourrait témoigner de cette situation sarcastique que nous vécûmes le mois d’Août dernier sur le Salat dans l’Ariège.

Seule solution envisageable : louer les services d’un bon guide-technicien (Coucou Pascal Martin!) pour m’aider à gagner les deux mètres qui me manquent pour paraître moins ridicule l’été prochain! 

Toutefois et si l’on en doutait encore, cette anecdote prouve bien que la truite s’adapte à nos techniques, mouches ...et performances.

10- Le poisson se nourrit-il vraiment?

Il est fréquent de repérer une truite qui bien que postée ne semble pas se nourrir. J’aime bien observer assez longuement ce genre de truite. Parfois ce poisson est tout simplement “fainéant” car sans doute rassasié et ne se saisit d’une proie qu’en de très rares occasions. Ce sont des poissons passionnant car très difficiles, d’où l’intérêt de les observer suffisamment longtemps afin d’être sur de son fait.

Dans d’autres circonstances, il est effectif que notre truite ne se nourrit pas du tout. Soit elle n’a pas faim et prend juste le soleil…c’est ce que disent certains pêcheurs...

Dans ce cas, on peut tenter de la provoquer en lui proposant notre mouche ... Il arrive que cela fonctionne.

Soit cette truite nous a détecté et rentre alors dans une phase de stress incompatible avec la fonction alimentaire. Ces truites là ont souvent la nageoire caudale légèrement repliée dans le sens latéral. Dans ce cas de figure, je m’abstiens d’insister.

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pêche gobage
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Une discrétion sans faille est nécessaire notamment lorsque le courant est lent
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LE CHOIX DE LA MOUCHE

Dans le cas où l’on voudrait me faire un mauvais procès d’intention, je précise bien que la mieux conçue et la mieux choisie des mouches ne contournera jamais une approche désastreuse, un manque de précision ou une dérive approximative…

Ceci étant dit, après avoir validé toutes les conditions inhérentes à la stratégie et à la présentation vient se poser à nous la fatidique question du choix de la mouche.

Si vous avez bien lu tout ce qui précède, vous avez compris que je suis plutôt enclin à maintenir une certaine cohérence entre les mouches que j’utilise et les insectes que je suis amené à rencontrer au fil de la saison.

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Christian Guimonnet
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©Hervé Thomas
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Comme je pêche depuis des décennies les mêmes terroirs, je sais grosso-modo quelles sont les mouches naturelles les plus convoitées des truites. La composition de mes boîtes évolue de ce fait au rythme de la saison. Etant passionné de montage et possédant quelques brèves notions d’entomologie, cela me facilite la tâche.

La réussite passe donc par une organisation et une composition judicieuse de ses boîtes.

J’évite de façon systématique les modèles trop voyants, trop fournis et les teintes qui ne cadrent pas avec la réalité des couleurs observées dans la nature.

L’inexactitude dans le volume réel de la mouche est le détail qui fait le plus souvent défaut chez de nombreux pêcheurs dès que la situation se corse. C’est la raison pour laquelle en tant que monteur, je suis très pointilleux sur le choix et l’utilisation parcimonieuse des matériaux car se sont eux qui déterminent le volume de nos artificielles.

Et le volume n’est pas la taille! Bien des femmes vous le confirmeront!!!

Dans l’absolu, on devrait connaître pour chacun des modèles de notre collection, pour quel usage (je n’ai pas dis “pour quel insecte”!!!) il a été conçu. Mais je crains bien qu’il ne s’agisse là d’un voeux pieux.

Le nombre de modèle de mouches est infini, tout autant que les cas particuliers et les spécificités locales, un livre entier n’y suffirait donc pas pour aborder en détail toute cette problématique.

Je suis donc navré de vous annoncer que je vous ne donnerais pas au travers de ces lignes la formule de montage de la fameuse “Mouche-Miracle”.

Mais comme les classiques ne meurent jamais, voici une liste de 10 mouches basiques qui, je le crois, ne devraient jamais quitter nos boîtes. En les déclinant en diverses tailles, nuances et tout autant de concepts, elles donneront une cohérence universelle à notre collection et nous tireront d’affaire dans 80 % des cas :

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Olive Dun
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OLIVE DUN : représentation de subimago de Baetidae.
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red spinner
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RED SPINNER : représentation généraliste d’imagos de nombreux éphémères.
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olive
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EMERGENTE D’OLIVE : nymphe de baetidae sur le point de muer en subimago voire la suggestion du subimago à peine éclos.
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pheasant tail
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PHEASANT TAIL : célèbre nymphe conçue par Frank Sawyer qui imite avec succès les nymphes nageuses, les plus appréciées des truites.
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elk hair caddis
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ELK HAIR CADDIS : mouche américaine très pratique qui combine le concept de “Palmer” avec l’utilisation de poils de cervidés en guise d’ailes. Excellente flottabilité et visibilité.
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ADAMS
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ADAMS : mouche d’ensemble par excellence, elle passe partout en toute saison.
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sedge roux
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SEDGE ROUX : un bon compromis pour pêcher l’eau en présence de trichoptères. Bien qu’on puisse le décliner dans d’autres teintes (gris, tabac, miel, etc,..) le roux passe bien et reste bien visible.
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altière
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ALTIERE : mouche conçue par Raymond Rocher, c’est une parfaite mouche d’ensemble qui représente bien une multitude de moucherons sombres.
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ORL
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OREILLE DE LIEVRE : mouche d’ensemble universelle pour figurer tout ce qui flotte bas sur l’eau, c’est un classique connu de tous.
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fourmi
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FOURMI : comme son nom l’indique, ce modèle représente une fourmi. Les hyménoptères...
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Maintenant la liste des mouches “saisonnières”, qui en dehors de leur période, restent à la maison :

  • MARCH BROWN ( Mars-20 Avril) : lire l'article spécifique ici
  • OLIVE UPRIGHT (Mi Avril-fin Juin)
  • BIBIO MARCI (15 Avril-20 Mai)
  • MOUCHE DE MAI (20 Mai-fin Juin)
  • BWO & SHERRY SPINNER (Juin-Juillet-Aout-Septembre) : lire l'article spécifique ici
  • TUPP’S INDISPENSABLE (Juillet-Aout-Septembre)

Bien sur, on peut éprouver le désir de posséder davantage de modèles et notamment de mouches dites “exactes” mais ceci est une autre histoire...

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boîte mouches
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De la déclinaison !
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CONCLUSION : DEFINIR UNE METHODE D’APPROCHE GLOBALE

Certes non, je ne vous ai pas livré, clé en main, la recette infaillible qui éliminera tous les refus de votre prochaine sortie de pêche. Je n’ai pas ce pouvoir. Néanmoins je reste convaincu que si ces quelques lignes vous invitent à une plus grande méthodologie et une meilleure cohérence dans la conception de votre boîte à mouches, vous verrez, sur l’échelle d’une saison, le pourcentage de refus diminuer, j’en suis intimement persuadé.

Tant qu’il y aura des rivières, des truites et des mouches nous aurons des refus, c’est inéluctable et même souhaitable. Par leurs refus, les truites remettent nos certitudes en cause. Cela nous pousse à affiner nos stratégies et à monter de meilleures mouches. Les refus sont inhérents à notre discipline et sont le carburant de notre quête, de notre dépassement. Et c’est ainsi que notre passion dure.

 

Photos de couverture ©Fabrice Bergues, autres photos de la rédaction sauf mention contraire, montages de l'auteur.

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Astuces et conseils pratiques :

  • Si au printemps lors d’une émergence d’olives (Large ou Medium) vous enregistrez trop de refus, essayez donc l’Iron Blue Dun...vous irez peut-être au devant de bonnes surprises...
  • Le fait de posséder une large éventail (en tailles et volumes) d’“Oreille de Lièvre” vous sortira de l’impasse dans de très, très nombreux cas tout au long de la saison et partout dans le monde.
  • Par temps chaud et durant tout l’été, ne pas être équipé d’une vaste gamme de fourmis serait une faute grave. Des brunes, des noires, des rousses, des longues, des courtes, des maigres et des dodues. Montez les dans toutes les tailles du 14 au 22 et vous serez parés pour faire face à bien des défis.
  • La Red Spinner est une mouche sous employée et souvent très mal montée. Je trouve fondamental d’en posséder quelques exemplaires de très bonne qualité qui sauveront, non sans une certaine classe, de nombreuses parties de pêche. Je cite (de mémoire) Albert Petit “...la Red Spinner est l’ancre d’amarrage à laquelle le pêcheur doit se raccrocher lorsqu’il démarre la pêche sur une rivière qu’il ne connaît pas...
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Christian Guimonnet
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©Hervé Thomas
Marryat Tactical Pro

A propos de l'auteur

Christian fait partie de ce que l'on pourrait appeler les "pêcheurs-naturalistes ". A une époque où le culte du nombre et de la taille des poissons…