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RÜGEN : pêche du brochet en wading et en eau saumâtre

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Je suis complètement passionné depuis 4 ans par la pêche du brochet à la mouche et lui consacre maintenant plus de temps qu’aux truites. Lorsqu’il s’agit d’organiser un séjour, le choix d’une destination nouvelle et de conditions inconnues sont des critères non négligeables. Les brochets des eaux saumâtres de la Baltique, étaient depuis plusieurs années dans un coin de ma tête mais c’est l’article de Pierre Rigalleau publié dans Truites et Cie il y a quelques temps qui a commencé à me décider à tenter une destination totalement différente de mes virées régulières en Espagne, Irlande et Laponie suédoise. C’est ensuite un échange téléphonique l’hiver dernier, avec Milan Ométak, guide et organisateur des séjours à Rügen qui finira de me convaincre de partir en choisissant la période de début novembre qui est à priori, pour lui, la plus favorable pour cette zone.

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L’équipe formée et la réservation faite, j’étais à la fois excité et plein d’incertitudes car nous allions être confrontés à des conditions complètement nouvelles pour tous les membres de notre groupe.

Je ne vais pas vous parler du biotope si particulier de cette région et notamment du niveau de salinité du bodden de Rügen qui permet à plusieurs espèces de poissons d’eau douce de côtoyer des poissons marins. L’article de Pierre consacré à cette destination le détaille remarquablement bien. Je vous invite à le lire ou le relire.

Je vais juste vous faire le récit d’une virée en bande de potes, qui devrait vous faire envie, pour peu que vous soyez prêts à affronter des conditions climatiques qui peuvent parfois sembler extrêmes.

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Paysage typique du bodden de Rügen
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Une pêche à pied en Waders

Une des raisons principales du choix de cette destination pour une première expérience de pêche du brochet en eau saumâtre est le fait de pouvoir pêcher à pied. Il y a bien sûr l’intérêt économique de ne pas avoir besoin d’un bateau.

Mais ici, même pas besoin de float-tube, le matériel est simplifié au maximum. Un wader, une canne et un sac à dos (ou gilet) constituent la totalité du matériel nécessaire. A la fin du séjour, je me contentais même de quelques streamers, d’un bas de ligne de rechange et d’une pince dans les poches de ma veste, pour éliminer le sac. Cette simplification de l’équipement rend cette pêche très agréable et l’on retrouve en partie les sensations d’une partie de pêche à la truite en rivière.

Je n’ai pour l’instant connu aucune autre destination où il est possible de traquer le brochet à la mouche pendant une semaine entière sans le moindre engin flottant.

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Un équipement réduit au plus simple et un peu de marche suffisent pour être en action
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Le fait de pouvoir être en action quelques minutes après être descendu de voiture est extrêmement agréable et un changement de secteur de prospection devient d'une simplicité totale.

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Une pêche de copains

A Rügen, on pêche en groupe. 4 pêcheurs en général et 5 dans notre cas. J’avoue avoir été un peu sceptique au départ sur ce principe, privilégiant habituellement la prospection d’un secteur en solo. En Irlande, où il nous arrive de partir aussi entre copains, on se sépare le matin, 2 par véhicule et une fois au bord de l’eau, chacun prospecte un secteur différent. Ici, il s’avère que pêcher à plusieurs est un vrai avantage pour trouver les zones d’activité. Et puis, pêcher en groupe c’est pouvoir échanger en permanence avec les copains, rigoler, garder le moral quand il n’y a pas d’activité ou que la météo devient vraiment difficile et rire encore, beaucoup rire.

L’hébergement se fait dans une maison tout confort réservée par notre guide dans laquelle nous partageons les repas et cuisinons à tour de rôle. La nuit tombant vers 16h30, le sauna et le feu du poêle sont bien appréciables. Les parties de cartes peuvent s’enchainer entrecoupées de défis au baby-foot. Oui, la maison est vraiment très bien équipée. `

Pour Rügen, former une bonne équipe est au moins aussi important que d’avoir le bon matériel !!!

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La fine équipe. Enfin, pas toujours si fine…
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En action, toujours à portée de voix de tout le groupe
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Si la raison première de notre présence ici était de pêcher en eau saumâtre, il s’est vite avéré que les principaux atouts de ce séjour étaient la simplicité de la mise en action avec un minimum d’équipement et la convivialité de tous les instants.

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Les doublés et même triplés n’ont pas été rares. De bons moments de partage
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Dépaysement

Si, au premier abord, les paysages semblent un peu monotones, ils ne manquent pas de charmes. Les terres agricoles de la région, lorsqu'elles s’approchent de l’eau, laissent place à des zones plus diversifiés et se terminent par d’immenses roselières qu’il faut traverser pour atteindre l’élément liquide. Dès nos premiers pas dans l’eau saumâtre, nous trouvons de grandes quantités de méduses qui poussées par le vent, viennent s’amonceler le long des roseaux. Parfois, c’est un poisson plat qui s’échappe de nos pas.

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Des lumières inoubliables
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Ce qui nous a probablement le plus marqués, ce sont les lumières toujours si particulières dans les régions où même à son zénith le soleil ne monte pas bien haut dans le ciel.

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Au milieu des méduses pour nous rappeler que nous ne sommes pas en eau douce
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Quant aux locaux, croisés sur la route, lors des courses ou dans les pubs, le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils ne sont pas bien chaleureux. Nous sommes surement un peu trop loin des pays latins. Et que dire de ces pêcheurs allemands qui après nous avoir repérés de loin, sortiront d’une roselière pour se positionner quelques dizaines de mètres devant nous dans notre axe de pêche nous empêchant de continuer de progresser. Bien sûr, ils ne nous ont pas salué et ont évité de regarder dans notre direction. J’ai bien essayé d’avoir une explication avec eux en anglais mais ils ne voyaient pas quel était le problème.

Heureusement, le terrain de jeu est tellement grand que cela ne s’est pas reproduit.

Lors de notre séjour, nous croisons, notamment sur les parkings, des pêcheurs de nombreux pays d’Europe. Suisse, Pays-Bas, Pologne etc…tous cannes à mouches à la main et avec eux nous avons pu chaleureusement échanger. Rügen a vraiment acquis une notoriété internationale pour la pêche du brochet à la mouche. 

Milan, de son côté, a réussi à tisser un solide réseau avec les locaux. Il peut ainsi échanger sur les conditions de pêche et obtenir des accès privés à certaines berges.

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Des poissons à la robe magnifique
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Stratégie

La pêche se pratique sur des plateaux où nous avons de l’eau entre les genoux et le haut des cuisses. Ils se prolongent parfois à plus d’un kilomètre de la berge. Bien choisir son spot pour une session est primordial car les brochets ne colonisent que certains plateaux en fonction de différents éléments et changent souvent de secteur.

Chaque jour, Milan choisit notre destination en fonction de plusieurs critères qui sont dans l’ordre :

  • Niveau d’eau : ce sont essentiellement les vents dominants au Danemark qui influent sur le niveau d’eau ; les marées ont peu d’impact.
  • Exposition au vent : il doit préférablement souffler parallèlement à la berge. Les jours de vent fort, il faut choisir des secteurs protégés.
  • Vérification des spots : ils ne doivent pas être classés en réserve temporaire ou permanente.
  • Types d’herbiers présents sur le secteur : les secteurs sans herbiers n’abritent pas de brochets.
  • Largeur du plateau.
  • Proximité d’un tombant.
  • Variations du substrat.
  • Présence de poissons fourrages...

Cette liste de critères montre à quel point l’accompagnement par un guide qui maitrise l’environnement et le comportement des poisons est INDISPENSABLE.

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Quand on est guidé par Jésus, il ne peut rien nous arriver
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Une fois trouvé le secteur qui réunit toutes les conditions nécessaires, la progression se fait parallèlement à la berge, vent dans le dos pour pouvoir lancer. Les secteurs où le vent souffle perpendiculairement à la berge ne sont pas favorables, notamment en raison de la houle induite qui fait bouger le fond de l’eau ce que n’aiment pas les brochets de la région.

On se positionne en ligne en maintenant une distance d’une bonne trentaine de mètres entre chaque pêcheur. On pêche en marchant, lentement mais régulièrement pour optimiser le terrain couvert. Pour la même raison, on lance un coup à droite et un coup à gauche évitant ainsi avec la progression constante de faire passer le streamer 2 fois au même endroit.

L’organisation semble quasi militaire, d’autant que pour ne pénaliser aucun participant, on essaie d’avancer en essayant de bien garder la ligne. Finalement, on s’y fait, on s’applique et le sergent Milan est assez vite fier de ses troupes.

Tout cela est tout à fait inédit pour tous les membres de notre groupe.

Nous allons cependant nous rendre compte assez rapidement de l’efficacité de cette stratégie. A l’œil, impossible de deviner les secteurs qui tiennent les poissons et les plateaux s’étalent sur plusieurs kilomètres le long des berges. Nous avançons donc en couvrant environ 200 mètres de largeur en espérant la première touche. En général, lorsque celle-ci se produit, rapidement un autre pêcheur en a une. Les poissons sont toujours plusieurs sur un même secteur.

Un autre avantage de la pêche en groupe et de pouvoir tester simultanément différentes options : types de streamers, animations etc… et de constater immédiatement les différences pour ajuster la stratégie.

La couverture d’une zone de prospection assez large permet de constater la distance de positionnement des poissons par rapport à la berge. En effet, lors des périodes d’activité, on se rapprochera de la cassure (si le fond le permet) si c’est le pêcheur positionné à l’extérieur qui a le plus de touches et à l’inverse, on se rapprochera des roselières de la rive si c’est celui le plus à l’intérieur qui a de l’activité.

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Un métré, ça donne toujours le sourire
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Matériel/streamers

Pour le matériel, c’est assez simple.

  • Canne pour soie de 8 à 10 mais avec les conditions souvent venteuses, une soie de 10 semble la mieux adaptée. Il est à noter que mon ami Jef, grand amateur des cannes en fibre de verre, a fini le séjour avec une canne en carbone pour mieux composer avec le vent...
  • Soie flottante uniquement. On pêche dans moins d’un mètre d’eau avec des herbiers au fond. Prévoir une soie de rechange car avec les conditions météo parfois bien difficile et l’eau salée, elle peut s’user rapidement.
  • Moulinet compatible avec l’utilisation en eau salée.
  • Une liste très réduite d’accessoires : pince pour décrocher, pince coupante et éventuellement un panier de lancer.
  • Sac à dos étanche.
  • Prévoir des vêtements chauds et imperméables. A Rügen il peut faire froid, très froid, le vent peut souffler fort, très fort et la pluie peut être violente. Et parfois, ces 3 éléments se cumulent : une très bonne veste de pluie, un wader respirant épais ou en néoprène sont indispensables. Personnellement, j’ai opté pour le néoprène avec bottes et ne l’ai pas regretté, avec plusieurs couches de sous-vêtements thermiques pour le bas et le haut du corps. Plusieurs paires de chaussettes, gants, bonnet, tour de cou etc… N’ayez pas peur d’avoir trop chaud, le froid vous fera stopper la pêche si vous n’êtes pas assez bien équipés.
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​​​​​​Pour les streamers, il n’y a pas besoin de beaucoup de modèles mais de 2 types bien différents.

  • Les streamers aux couleurs vives : Jouant sur l’agressivité des poissons, ils doivent être animés le plus rapidement possible. Ne pas hésiter cependant à faire des pauses qui parfois déclenchent les attaques. A privilégier par mauvais temps et notamment les journées venteuses. C’est avec les pires conditions météo (vent fort et pluie) que nous avons eu nos meilleurs résultats en nombre de captures.  Mention spéciale pour le duo de couleurs orange/chartreuse.
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  • Les imitations de gobie : C’est le poisson fourrage recherché par les brochets de la région. De petites tailles et de couleurs sombres (brun/noir). Vos imitations ne doivent pas dépasser 10 cm. Ils font la différence par temps calme et ensoleillé. Nous n’avons eu qu’une demi-journée où ils ont été plus efficace mais, sur cette période, il n’y avait plus aucune touche avec des streamers de couleurs vives. C’est une imitation de gobie de moins de 8 cm qui prendra le plus gros poisson du séjour.

 

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Jef sera le seul à garder le panier de lancer
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Logistique

Rügen se trouve au nord de l’Allemagne et à proximité de la frontière polonaise.

Si comme moi, vous habitez dans le sud de la France, il faut prévoir une bonne vingtaine d’heures de conduite pour y arriver en voiture. L’avantage est que vous serez moins limités en bagages et pourrez apporter par exemple un wader de rechange ou quelques victuailles et boissons made in France.

Si la conduite vous rebute, surtout en conditions hivernales, il est possible d’atterrir à Hambourg ou à Berlin (nombreux vols directs depuis les grandes villes). Il vous restera 3 heures de route en voiture de location.

Pour l’hébergement, Milan se charge de réserver une maison grand confort pour le groupe et la durée du séjour. Il est à noter que la plupart des maisons de cette région disposent d’un sauna et sont parfaitement équipées (nous l’avons évoqué plus haut).

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S’il est toujours possible de trouver un lieu pour aller boire une bière, préparer sa propre tambouille dans une cuisine parfaitement équipée sera un meilleur gage de qualité et de convivialité que d'opter pour les quelques restaurants du secteur. Tenez en compte au moment de former votre équipe, un cordon bleu vous sera plus utile qu’un champion de la double traction...

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Conclusion

Comment évaluer la réussite d’un séjour ? Peut-être par l’envie des participants de renouveler l’expérience ? Nous concernant, nous avons tous réservé notre place pour l’année suivante.

La simplicité de la mise en action de la pêche en waders et la découverte d’un biotope totalement nouveau furent des éléments déterminants de réussite. Mais plus que tout, c’est le partage entre copains, la convivialité et les parties de rire qui auront été les éléments marquants de notre périple. Tout était réuni pour cela, le lieu de vie et les repas préparés puis partagés et la stratégie de pêche en équipe. Milan, pour son organisation du séjour impeccable et sa connaissance précieuse des conditions de pêche était indispensable mais c’est son intégration à notre équipe qui aura été le fait le plus remarquable. Difficile d’imaginer qu’on ne se connaissait pas quelques jours avant.

Vivement de se retrouver tous en Novembre prochain.

Nous viendrons une semaine plus tôt pour tenter des conditions météo plus clémentes et voir, quand l’eau est calme, des vagues se former dans le sillage de nos streamers...

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Contact

Milan Ométak

06 84 20 97 20

dernierlancer.com

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A propos de l'auteur

Eric découvre la pêche à l’âge de 4 ans sur les épaules de son père le long des rives de l’Ariège et de la Garonne non loin de Toulouse, sa ville natale. Naît alors une…