Où que l’on vive, il y a toujours à proximité, un plan d’eau avec des brochets. Ils peuplent la plupart des lacs, étangs et rivières de France. Mais souvent la densité n’est pas élevée, la pression de pêche forte et traquer ce carnassier à la mouche n’est surement pas la méthode la plus simple et rarement la plus efficace. Il résulte de cela une pêche difficile, voire ingrate et il faut souvent s’armer de patience pour capturer un grand bec avec un streamer.
Étant passionné de voyages et notamment de voyages de pêche, j’ai naturellement eu très vite envie, après avoir commencé la pêche du brochet à la mouche, d’aller visiter un des paradis à brochets de la planète. J’avais envie de trouver des zones à forte densité de poissons offrant une pêche ludique, si possible en surface ou subsurface permettant de voir les attaques...
Les grands lacs du sud de l’Espagne (Extremadura) ont acquis une réputation internationale pour la pêche du carnassier. Introduit dans les années 50, le brochet s’y est particulièrement bien adapté. Les poissons sont cependant surtout présents dans d’immenses lacs de barrage, profonds et peu propices à la pêche à la mouche.
Les zones de prédilections originaires du brochet sont les régions subarctiques. Eau froide, lacs naturels et grandes rivières, faible profondeur en de nombreux lieux, grands espaces, Nature sauvage, très faible pression démographique …. C’est au nord que se trouve mon paradis halieutique !
L’Alaska et le Canada étant interdits d’accès en cet été 2021 c’est la Scandinavie qui concentre mon attention. J’ai déjà visité la Norvège et j’en garde un souvenir mitigé. Il reste donc la Suède et la Finlande.
C’est à ce stade de mes recherches que j’ai contacté Sylvain Duvinage de la société de voyages Nomade Pêche. Lui ayant exposé mon projet, il m’a tout de suite recommandé un nouveau produit de son catalogue : la pêche du brochet en Laponie suédoise.
Quelques jours après, tout était réservé pour 2 personnes, ma compagne s’étant laissée tenter par l’aventure nordique. Au programme, une semaine dans un camp en limite de Laponie, dont trois jours avec un guide français qui passe l’été sur place avec son bateau.
Nous atterrissons à l’aéroport de Stockholm fin juin et après un rapide séjour dans la capitale suédoise, nous prenons la direction de la Laponie.
Dès les premiers kilomètres, le décor est posé. Il y a de la forêt et de l’eau partout. La suède compte près de 100 000 lacs de plus d’un hectare sur un territoire plus petit que la France. Ils sont tous censés abriter une population conséquente de carnassiers et l’on a envie de s’arrêter partout tenter sa chance canne à la main. Le paysage est magnifique et presque monotone, plus nous allons vers le nord moins il y a d’habitations.
Notre camp de pêche se trouve à moins de 7h de route de l’aéroport de Stockholm mais nous avons décidé de prendre les routes secondaires à l’intérieur des terres pour mieux s’imprégner de l’ambiance bucolique et ce n’est qu’après 2 jours de vadrouille que nous arrivons à destination.
Nous sommes accueillis chaleureusement par notre hôte suédois et prenons possession de notre chalet tout confort, dans les bois et face à un magnifique plan d’eau.
Une barque en alu de 4,40m équipée d’un moteur 4cv est à notre disposition au ponton juste en face du chalet et notre hôte nous montre, sur les cartes qui sont à notre disposition, les 4 autres lieux où des embarcations identiques nous attendent pour explorer les lacs plus modestes et rivières des environs. Nous avons vraiment l’impression d’être arrivés au paradis de la pêche, d’autant plus que nous sommes les seuls occupants des 4 chalets du camp et en deux jours de route nous n’avons pas encore vu un suédois canne à la main. Il faut également préciser que nous avons atteint une latitude à laquelle en ce début juillet le soleil disparaît derrière l’horizon 3 ou 4 heures par jour mais il ne fait jamais vraiment nuit. Cela signifie qu’il est possible de pratiquer sa passion 24 heures sur 24 !
Nous tentons très vite une première sortie sur le grand lac avec la barque en suivant les conseils de notre guide qui nous rejoindra bientôt mais est en permanence joignable pour nous aiguiller. Nous faisons ainsi nos premiers lancers dans une magnifique petite anse de l’immense lac et avons nos premières attaques, toutes en surface dès les premières minutes.
Ces premières prises sont globalement des poissons assez modestes, mais quel plaisir de les prendre en surface dans un tel cadre. C’est exactement ce que nous sommes venus chercher.
Les sorties suivantes confirment tout le potentiel de cet immense plan d’eau. Les brochets sont nombreux et nous ne pêchons que les herbiers, en surface, les soies plongeantes reprendront du service à notre retour. Le lac abrite également une très grosse densité de perches et tomber sur des bancs de poissons de 35cm en moyenne est extrêmement ludique. Dans ce cas, nous fixons le manche de l’épuisette à la barque pour improviser une bourriche qui se remplit rapidement de quelques kilos de ces magnifiques poissons.
Dès le deuxième jour, nous avons envie d’explorer d’autres terrains de jeux et en suivant les conseils de notre hôte nous décidons d’aller tester un des petits lacs sur lesquels il a mis une barque à disposition de ses clients.
Après avoir garé la voiture le long d’une piste, c’est une marche d’une vingtaine de minutes qui nous permet d’accéder à un magnifique plan d’eau, caché au milieu des collines boisées.
Il n’y a même pas de chemin qui fasse le tour du lac et on se demande comment la barque motorisée est arrivée jusque-là. Nous réalisons le fantasme de nombreux pêcheurs, avoir un plan d’eau juste pour nous. Il nous faut un petit moment pour comprendre la pêche, le temps de réaliser qu’il ne sert à rien de prospecter pleine eau. A partir du moment où nous concentrons notre activité dans les roselières, les touches se succèdent, plus spectaculaires les unes que les autres. Nous manquons beaucoup de poissons en raison des roseaux, en prenons quelques beaux mais surtout nous apercevons 2 énormes brochets, probablement métrés, dont un qui créé une énorme vague en suivant mon streamer et restera longtemps gravé dans ma mémoire. Ce sont souvent les poissons que nous ne prenons pas qui alimentent le plus nos rêveries halieutiques.
De retour à notre camp de base, après la petite marche vers notre véhicule et quelques dizaines de minutes de conduite, je saute dans la barque accrochée au ponton devant notre chalet et enchaîne une nouvelle session. Lors de ce séjour, je ferai en moyenne 4 sorties quotidiennes en alternant les lieux de pêche et sans jamais m’éloigner à plus de 20 min de voiture de notre chalet.
En plus des différents spots à carnassiers il est possible de traquer ombres et truites dans la magnifique rivière toute proche de notre gite. Là encore, nous sommes absolument seuls.
Malgré la qualité de la pêche, nous y faisons une unique courte session car ce sont bien les brochets qui nous attirent prioritairement.
Le troisième jour, nous sommes rejoins par Antoine, notre guide français. Si c’est la première fois que nous le rencontrons, nous échangeons avec lui par téléphone depuis que nous avons réservé notre séjour. Il nous a beaucoup aidés dans la préparation de notre escapade et depuis notre arrivée sur le sol suédois, nous profitons quotidiennement de son expérience des lieux.
Après la mise à l’eau rapide de son outil de travail, un bateau en fibre de 4,70m équipé d’un moteur de 20cv, d’un moteur électrique et d’une électronique de qualité, nous partons pour une première virée avec lui.
Son embarcation nous permet de découvrir des secteurs plus éloignés, il faut dire que le lac devant le chalet est immense et relié à 2 autres plans d’eau d’envergure. Les options sont quasiment illimitées ! Sa connaissance des lieux et des carnassiers nous apporte tout de suite une pêche encore plus efficace.
Il consacre pas mal de temps à faire progresser Violaine avec beaucoup de finesse dans une pêche qu’elle a découvert il y a peu tout en me mettant dans les meilleures dispositions pour pratiquer à la mouche.
Quel luxe de pouvoir pratiquer notre passion dans de telles conditions.
C’est avec Antoine que nous partons découvrir la rivière en amont du camp et sur sa partie navigable. Nous prenons une barque de notre hôte, le profil du cours d’eau ne permettant d’utiliser l’embarcation de notre guide. Nous nous enfonçons ainsi encore plus profondément dans une Nature qui semble vierge, observant les berges pour tenter d’apercevoir un renne, un élan ou même un ours, ces animaux sauvages étant bien présents dans cette région.
Après avoir remonté la rivière sur quelques kilomètres au moteur, Antoine prend les avirons et nous pilote façon drift boat américain alors que nous commençons à pêcher. La rivière est large, calme et remplie d’herbiers qui laissent une couche d’eau libre peu épaisse. Les conditions sont parfaites pour pêcher en surface. Nous prenons ainsi de très belles perches et quelques brochets dont un magnifique 93cm pour moi.
Notre guide décide de remonter un affluant alors que la pluie vient d’arriver. La couche d’eau libre est encore plus fine et nous voyons de nombreux brochetons de l’année suivre ou taper sur nos leurres. Antoine vient tout juste de nous dire qu’il peut toujours y avoir une big mama présente pour se nourrir de ses petits congénères quand Violaine voit au ras de la barque une énorme gueule s’ouvrir sur son leurre. Le combat sera épique dans les herbiers alors que la pluie redouble. Après quelques minutes c’est un magnifique poisson, tout en longueur comme le sont souvent les poissons nordiques, qui rentre dans l’épuisette.
Nous ne sommes pas venus en Suède pour cibler des poissons records mais c’est toujours excitant de mesurer un poisson à 113cm. Encore une fois c’est Violaine qui attrape le plus beau spécimen !
Nous continuons cette journée si particulière en remontant l’affluant à la recherche de zones propices. La végétation est parfois si dense qu’il faut descendre de la barque pour la tracter. Nous avons vraiment la sensation de vivre une petite aventure avec toujours cette incroyable sensation d’être seuls au monde.
De retour à notre chalet et avant une dernière session nocturne nous avons le plaisir de déguster un succulent repas offert par notre hôte suédois et cuisiné par son épouse.
Un extraordinaire ragoût d’élan aux airelles, considéré ici comme un plat royal, qui nous fait regretter de n’avoir pu apporter une belle bouteille de Bourgogne.
Les 3 jours avec Antoine passent trop vite, à raison de 3 sorties quotidiennes en des lieux différents. Sa gentillesse et ses compétences nous font regretter son départ lorsqu’il va rejoindre d’autres clients français qui pêchent la truite du côté de la frontière norvégienne.
Grace à ses conseils nous continuons de prendre de nombreux poissons jusqu’à la fin de notre séjour. La semaine arrive à sa fin mais comme nous avons un peu de marge avant notre vol retour nous décidons de rester une nuit de plus sur place. Nous profitons de cette journée supplémentaire pour profiter d’une autre opportunité qu’offre notre camp. Notre hôte est passionné par les ours. Ils sont sauvages et très durs à apercevoir même s’ils sont assez nombreux dans la région. Il nous propose de passer une nuit dans une cabane rustique qu’il a construit au fin fond des bois en un lieu où il dépose quotidiennement de la nourriture pour augmenter les chances de rencontre avec les ours.
Encore une fois, c’est une petite aventure avec ce sentiment de solitude si agréable quand il est choisi et inhabituel.
Nous n’avons quasiment pas dormi de la nuit pour apercevoir quelques ours mais à notre retour au chalet, je veux consacrer encore quelques heures à traquer les derniers brochets à la mouche et à m’imprégner des magnifiques paysages de cette région avant de reprendre la route vers l’aéroport.
Je prends ainsi mes tous derniers brochets suédois dans le lac principal devant notre chalet.
C’est avec beaucoup de regrets que nous quittons ce petit coin de paradis. Ce premier voyage de pêche pour le brochet à la mouche aura dépassé nos attentes en termes de qualité et de réussite. Tout d’abord, nous avons bénéficié avec « Nomade Pêche » d’une organisation sans faille et Sylvain Duvinage aura su trouver LE produit qui nous convenait dans son catalogue. Nous avons attrapé de nombreux poissons en surface ou à vue et n’avons au cours de ces 8 jours croisé qu’une fois d’autres pêcheurs. Habitué de la pêche aux USA, je trouve que c’est un plaisir rare en des lieux aussi facilement accessibles.
Dès le vol retour, un peu nostalgiques de ce séjour hors du temps, nous avons envisagé de revenir en terre suédoise l’été suivant.
Nous avons finalement réservé pour juillet prochain un séjour plus long. Nous retournerons une semaine dans notre petit chalet nordique et sur les conseils d’Antoine et de Sylvain nous avons réservé quelques jours dans une autre région pour pratiquer en rivière. Notre guide sera encore plus présent à nos côté et Violaine qui pour rien au monde ne voudrait rater ce nouveau périple attrapera probablement le plus gros poisson du séjour…