Pourquoi pêcher la truite aux leurres souples ?

pêche truite leurre souple

Une vague de leurres souples a déferlé sur l’Europe au début des années 2000. A l’origine, cet afflux a essentiellement concerné les pêcheurs de carnassiers d’eaux calmes. Ce n’est que beaucoup plus récemment que les softs ont trouvé leur place dans les boîtes des pêcheurs de salmonidés (le truiteux serait-il plus conservateur ?). La fréquence de leur emploi reste moins importante que n’importe quel autre procédé plus classique. C’est une chance qu’il faut saisir. Vos rivières sont le théâtre d’un déballage massif de cuillers où de poissons-nageurs dès l’ouverture… tentez de vous démarquer avec les leurres souples ! Mais avant de se consacrer à la technique pure, qui sera l’objet d’une seconde partie, si nous essayions de répondre de façon détaillée à cette simple question : pourquoi pêcher la truite au leurre souple ?

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Saisonnalité et poissons difficiles

Si le rédacteur en chef fait son boulot correctement, cet article devrait être publié pour l’ouverture 2020. Le timing serait parfait car cette époque de l’année est particulièrement propice à la pêche de la truite au leurre souple. Les eaux étant froides, les poissons se tiennent près du fond et rechignent à se déplacer. Ils se nourrissent des proies passant à proximité de leurs gueules. Le LS permet de répondre à toutes les exigences du début de saison : passer dans les couches inférieures, plutôt lentement et avec précision. C’est certainement la technique « leurre » convenant le mieux aux conditions du moment.

Mais il est tout à fait possible et même recommandé de pêcher avec ces petits bouts de plastiques plus tard dans l’année. Les attitudes décrites ci-dessus (truites peu mobiles, calées au fond) ne sont-elles pas celles de tous les poissons difficiles, quelle que soit la saison ? C’est en cela que cette technique est redoutable : elle permet de leurrer les sujets ne répondant pas aux poissons nageurs et cuillers en tous genres, souvent les individus les plus aguerris, les plus vieux et donc les plus imposants. L’usage de softs est une excellente solution pour piquer les plus gros spécimens.

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Jouez la différence

Les leurres souples sont relativement peu employés pour rechercher la truite. L’attrait de la nouveauté, de l’originalité ; cette forme de non-conformisme halieutique peut permettre de convaincre les poissons éduqués aux pratiques plus « conventionnelles ». Analysons rapidement ce que produisent ces dernières en action de pêche (tout du moins les plus connues) :

Les leurres métalliques (cuillers tournantes ou ondulantes, lames, devons etc…) et les poissons nageurs se déplacent en décrivant des mouvements d’une grande intensité. Ils émettent de fortes vibrations et peuvent provoquer des signaux visuels et sonores très importants. D’ailleurs, mêmes lorsqu’ils sont qualifiés de silencieux, ils font toujours du bruit. Les hameçons et les anneaux brisés s’entrechoquent et peuvent frapper le corps du leurre en animation. Le rendu sous l’eau doit être bien éloigné des sonorités provoquées par des vairons durant la fraie… Ces leurres plus traditionnels ne passent pas inaperçus. Ils se comportent tels des caricatures de poissonnets évoluant dans une rivière. La prospection est assez agressive, il s’agit de provoquer le prédateur. Cette façon de pêcher convient à certains tempéraments (dont le mien). C’est très efficace à la condition d’être employé avec modération. Car force est de constater qu’une fois qu’une fario a croqué à un de ces artifices, elle ne l’oubliera pas de sitôt, l’identifiera facilement dans l’eau et l’interprétera comme un danger et non plus comme une proie.

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Les softs se manifestent différemment. Quasiment tous les leurres souples sont véritablement silencieux. Ils doivent bien faire un peu de bruit en se déplaçant sous l’eau mais cela reste très limité et finalement assez proche des sons habituellement perçus par la truite. Aussi, la nage est plus fine, plus douce. Ils représentent une alternative plus discrète et généralement bien plus proche de ce que peut rencontrer une fario dans une rivière. De plus, la palette des coloris désormais disponibles est immense et la qualité de finition a fait des progrès considérables ces dernières années. Si la nage naturelle est associée à un colori adapté, nous ne sommes pas loin du piège parfait…

L’éthique

Et l’éthique dans tout ça ? Il vous est peut-être déjà arrivé de vous faire traiter de « ferrailleur » ou de « pêcheur de plastique ». L’auteur de tel propos est souvent un moucheur élitiste qui aimerait avoir la rivière pour lui seul (et ses amis coiffés d’un chapeau à plumes, à la rigueur). Il se peut aussi qu’il soit jaloux de votre réussite, alors qu’il aurait de meilleurs résultats qu’un pêcheur aux leurres s’il maitrisait vraiment sa technique. Et d’embrayer sur le fait que lui pratique un « vrai no-kill » car il n’utilise qu’un seul petit hameçon simple sans ardillon, que tous ses poissons sont piqués en bord de gueule, qu’il ne les mutile pas avec des triples, etc, etc, etc… Sachez qu’en pêchant aux souples, vous serez le roi du « catch and release » (si vous souhaitez relâcher vos prises, bien sûr). Comme les moucheurs, vous pourrez pratiquer avec un seul hameçon simple sans ardillon ou avec ardillon écrasé. Mais à l’inverse d’eux, vous utilisez un matériel qui permet vraiment de sécuriser vos prises et d’abréger les combats si vous le souhaitez. Nous ne recherchons pas les gros poissons en nymphe avec du 8 centièmes… La canne a souvent une meilleure réserve de puissance, le moulinet dispose d’un vrai frein de combat et la ligne possède une résistance plus conséquente du fait d’un diamètre généralement supérieur. Le poisson pris avec un soft peut retourner à la liberté sans fatigue excessive, sans aller crever au fond de l’eau après un combat trop long causé par un matériel pas assez puissant.

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Je profite de ce passage « déontologiquement correct » pour souligner un point : je pense qu’il ne faut pas pêcher la truite aux leurres souples avec un triple voleur. Je l’ai eu fait quelquefois par le passé, en lac, pour essayer de « grappiner » quelques farios peu décidées, qui titillaient les leurres sans vouloir les aspirer. Maintenant j’estime qu’il faut affiner son raisonnement pour trouver ce qui va faire la différence et convaincre les poissons d’attaquer franchement. N’est-ce pas cela la pêche, chercher et trouver comment faire mordre ces sales bêtes à écailles ? La solution peut se trouver du côté de la couleur, de l’angle de la dérive, du poids ou de la forme de la tête plombée… Le champ d’investigation est vaste. C’est un raisonnement très « jusqu’au-boutiste » qui me permet d’apprécier assez régulièrement les vertus du capot.

Polyvalence / adaptabilité / les postes

Autre propriété de la pêche aux leurres souples, sa grande adaptabilité aux profils des cours d’eau. Les leurres durs ou métalliques sont conçus pour un certain usage, pour évoluer dans des conditions déterminées, dans une couche d’eau définie et acceptent un flux d’une intensité donnée... Ils montrent leurs limites en certaines circonstances. Par exemple, ils ne parviennent pas à prospecter efficacement de très forts courants si les profondeurs sont importantes et ils peuvent « sauter » si le débit est trop soutenu pour eux (ils saturent). Aussi, ils sont moins prenants sur des postes très ciblés car leurs mises en action est plus longue et ils ne sont pas toujours très attractifs à la descente.

A l’opposé, tous les postes sont pêchables avec des softs. Absolument tous, du plus restreint au plus vaste, du plus calme au plus tumultueux, de la surface aux abymes… et cela est valable sur les zones où les PN et les leurres métalliques sont inopérants ou limités. Un LS pêche donc partout … et tout le temps. En effet, il se met en action dès qu’il touche l’eau et continue de pêcher lors de la descente et jusqu’au fond. Il suffit d’ajuster le grammage des têtes plombées sur les postes à la vitesse d’écoulement et à la profondeur les plus extrêmes. Mais en définitive, il est plutôt rare de changer la plombée. La plupart du temps, les rivières ont un profil assez peu varié sur le linéaire pêché (par exemple sur un cours d’eau de piedmont pools et radiers alternent avec des débits et des profondeurs assez similaires). Tenir la canne plus ou moins haute, varier la vitesse de récupération de la bannière et se placer de façon judicieuse par rapport à la zone prospectée et en fonction du courant permet généralement de passer efficacement sur tous les postes avec le même poids de lest.

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De cette polyvalence découle une nécessité d’équipement en matériel assez faible. Si pour le poisson nageur par exemple, il est indispensable de posséder un panel de références pour répondre aux différentes exigences de la topographie fluviale, en ce qui concerne le leurre souple, quelques modèles de TP déclinées en deux ou trois grammages et trois ou quatre formes de softs suffisent. Les LS étant bien moins chers que leurs homologues à corps durs, il est possible de s’équiper de façon pertinente pour un budget équivalent à celui d’un ou deux PN. Vous voulez pêchez aux leurres et vous n’avez pas un budget mirobolant : commencez par les LS, c’est prenant et peu onéreux. Et pour finir de vous convaincre, je rajouterai qu’on en laisse beaucoup moins au fond, du fait d’un armement unique placé sur le dos. 

A bientôt pour parler technique LS ! 

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A propos de l'auteur

Comme ses aïeux, Pierre pêche depuis tout petit. A ses débuts, suivant la tradition locale pyrénéenne, il procède au toc. Mais dès le premier contact avec un lancer, il…