Partir sur les berges des écrins bleutés qui illuminent les pentes de nos massifs avec une canne à mouche accrochée sur son sac n’est pas réservé à une élite de randonneurs surentrainés. De belles escapades halieutiques accessibles sans se mettre dans le rouge sont possibles lorsque l’on adapte ses itinéraires à ses capacités. C'est ce que permettent les sublimes lacs d’Ayous dans les Pyrénées Atlantiques. Véritables joyaux lacustres, ces plans d’eau d’altitude subliment de leurs miroirs la silhouette majestueuse des pics qui les entourent, tout en offrant aux randonneurs moucheurs un terrain de jeu extraordinaire.
Des lacs accessibles dans un cadre grandiose
Cumulant au maximum 800m de dénivelé pour un total de 14km, le tour des lacs d’Ayous s’impose comme la rando parfaite pour débuter la pêche en lac de montagne sans développer un effort surhumain. A chaque étape de votre randonnée, vous pourrez adapter votre course en fonction de vos capacités. Le tour complet s’adresse à des marcheurs moyens en bonne condition physique. Les moins affûtés pourront s'en tenir aux premiers lacs qui cumulent seulement 550m de dénivelé.
Pour ceux qui veulent sublimer leur sortie, il est possible de passer une nuit au refuge d'Ayous sur les berges du lac Gentau. Cette pause vous permettra de scinder en deux votre randonnée tout en profitant d’une nuit inoubliable. Au-delà de la pêche, vous pourrez vous délecter d’un paysage incroyable depuis sa terrasse, évoluant en permanence d’un moment à l’autre de la journée.
Pêcher à la mouche sous le regard malicieux de Jean-Pierre (pic du Midi d’Ossau) est une expérience inoubliable rendant les résultats de votre pêche tout à fait secondaires. L’Ossau sublime ici chaque lac quand sa silhouette vient au gré de l’évolution du spectre solaire, se refléter sur leur surface. Vous pourrez faire le coup du soir et profiter de ce spectacle éphémère que seul un violent gobage pourra interrompre.
Un coin précoce et productif
Au-delà de l’éblouissante beauté du site, ces lacs de l’étage alpin sont particulièrement intéressants à prospecter canne à mouche dans la paume de la main. Excepté le Bersau, ces étangs d’altitude sont entourés de pelouses alpines offrant un bon dégagement arrière, ce qui ne sera que bénéfique à la réalisation de vos lancers.
D’altitude moyenne et bénéficiant d'une orientation favorable, cette série de lacs est assez précoce et la meilleure période pour pêcher se situe entre début juin et la mi-juillet. Ensuite, la température de l'eau augmente rapidement, ce qui fait décliner l’activité des salmonidés. Une exception existe avec le lac Bersau qui est le plus haut et le plus froid, où de belles pêches sont possibles jusqu’au mois d’août. En septembre, quand les températures commencent à fléchir, la pêche peut s’avérer excellente. Un autre paramètre est à prendre en compte est la fréquentation qui devient exponentielle entre le 14 juillet et le 15 août (toutefois il est toujours possible, en évitant les zones trop fréquentées, de toucher quelques poissons).
Victime à certaines périodes d’une fréquentation excessive, ce biotope fragile nous impose d’adopter un comportement respectueux. N’oubliez jamais que lorsque vous vous immergez au sein de dame Nature, l’intrus c’est vous ! De nombreuses espèces endémiques sont présentes sur les berges de ces torrents et lacs dont le Desman des Pyrénées. Appelé aussi « rat à trompette », ce petit mammifère prospère dans les torrents et les lacs du secteur. Mais de par son mode de vie nocturne, vous aurez peu de chance de l’apercevoir!
En matière de peuplement piscicole, vous trouverez des saumons de fontaine sur le lac Casterau et des ombles sur le lac Bersau, ces derniers s’y reproduisent parfaitement. Depuis quelques années, les alevinages sont constitués uniquement de truites fario, sauf sur le lac Casterau qui reçoit encore des saumons de fontaine pour le bonheur des moucheurs qui y déposent avec délicatesse leurs imitations.
Situées entre 1845m (Roumassot) et 2082m (Bersau), ces pièces d’eau de montagne sont plutôt productives et permettent un développement harmonieux et rapide des salmonidés qui y vivent. Tous ces lacs ont la particularité d’abriter de très solides fario qui sauront faire chanter le frein de votre moulinet. Ces magnifiques poissons sont cependant peu indulgents et regarderont avec méfiance vos artificielles, à vous d’essayer de les tromper !
Le tour des lacs canne en main
Laissez-moi vous amener découvrir ces joyaux en commençant cette boucle dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. La randonnée débute au départ du parking du lac de Bious-Artigues (1416m) qui présente peu d'intérêt pour la pêche à la mouche. Le sentier est très bien balisé et fréquenté pour ne pas trop risquer de s’égarer. Au pont de Bious, un embranchement nous invitera à partir vers le lac Roumassot. Ce bel écrin arrondi de 4,5ha pour 16m de profondeur, cerné par de magnifiques pelouses alpines constitue déjà un terrain de jeu fantastique. Comme tout lac de montagne il peut s’avérer capricieux et difficile quand les dames qu’il abrite se font boudeuses. Le fond de celui-ci est sédimenteux et alterne parties peu profondes et fosses. Les arrivées de tributaires constituent d’excellents spots mais je vous invite à privilégier avec application la bordure toute proche. En effet à la pointe du jour et parfois tard le soir, de beaux poissons maraudent à quelques centimètres de la berge. Opportunistes, ces truites viennent récolter les insectes échoués pendant la journée. Vous repèrerez ces poissons par les ondulations qu’ils provoquent en vagabondant dans quelques centimètres d’eau. Ils ne gobent pas forcément mais sont à l'affût et ne rechignent pas à se saisir d’une mouche perdue sur leur itinéraire. Evitez les faux lancers qui ne feront que les effrayer!
Quelques minutes après avoir quitté le lac Roumassot, nous découvrons le plus petit plan d’eau de cette série, le lac du Miey. En gestion no-kill et avec ses 1,6ha, il est parfait à prospecter à la mouche, les truites y sont nombreuses et souvent en activité. Au coup du soir ou le matin, il est possible de faire de très belles pêches en sèche mais aussi en nymphe à vue sur les bordures. Quelques herbiers du côté de l’arrivée d’eau conservent quelques truites tout au long de la journée. Il abrite une majorité de truites dont la taille varie entre 18 et 35cm mais il n’est pas impossible de se faire surprendre par un poisson plus conséquent. Les fario arrivent à se reproduire dans le tributaire qui alimente ce joli plan d’eau. Hameçons sans ardillon ou ardillon écrasé sont obligatoires afin de remettre avec délicatesse ces belles truites à l’eau.
Notre périple continue et quelques minutes plus tard nous découvrons le somptueux lac Gentau (1947m) et son refuge éponyme qui le domine de quelques mètres. D’une surface de 8ha pour 20m de profondeur, il contient de grosses truites souvent peu coopératives mais qui restent prenables avec un peu d’application. C’est sans nul doute le lac qui attire le plus de monde sur ses berges du fait de la présence du refuge, c’est aussi là que vous pourrez saisir avec votre appareil photo le pic du Midi d’Ossau se reflétant à sa surface. Les conditions de pêche ressemblent beaucoup à celles du lac Roumassot avec des poissons navigant souvent collés à la bordure au crépuscule. Les berges sont très accessibles et la pêche y devient vite compliquée les jours d’affluence, d’où l’intérêt de bien choisir sa période. La plage en bas du refuge est peu profonde et les poissons aiment y roder pour s’alimenter mais les touristes randonneurs y pullulent également! La berge d’en face comporte un petit haut fond où les truites chassent loin du bruit ; le déversoir est quant à lui tout aussi favorable.
Si la foule vous fait peur, ne vous arrêtez pas et continuez pour découvrir au bout d’une demi-heure les berges tortueuses du lac Bersau (2082m). Changement de décor sur le plus grand lac de cette série (12ha), ici les berges de pelouse alpine et les fonds sédimenteux laissent place à la caillasse dans un cirque minéral. Du fait de son exposition et de la configuration des berges, il dégèle plus tard. Dans ce grand lac, je vous invite à vous éloigner du sentier et à rejoindre le fond et les éboulis qui parsèment la bordure. De très belles truites y rodent, en particulier lorsque le vent vient y amener les insectes. En tout début de saisons il arrive parfois que les ombles chevaliers viennent en surface prendre quelques mouches mais cela reste anecdotique.
Si rien ne se passe à la surface, continuez le sentier vers le sud pour redescendre au lac Castérau (1943m). Ce plan d’eau moyen d’une superficie de 1,5ha est comme le lac du Miey, en gestion no-kill. Riche en truites fario et saumons de fontaine il peut s’avérer très productif certains jours. La berge que vous atteignez en descendant est peu profonde, quelques très beaux poissons y sont souvent actifs. Les individus de plus de 40 cm y sont relativement communs et vous offriront de belles émotions.
Vous rejoindrez ensuite après une bonne descente le pont de Bious que vous aviez laissé sur votre gauche à l’aller.
Nombre d’entre vous se demandent sans doute quelles sont les mouches artificielles à utiliser sur ces lacs, je vous renverrai à l’article que j’ai fait sur ma boîte à mouche en lac de montagne (ici). Par une belle journée légèrement venteuse n’oubliez pas quelques imitations de sialis. Ces insectes bien présents sur la totalité des plans d'eau rencontrés peuvent décider quelques poissons…
Bonne balade !
