Grosses truites à la mouche : le matériel adapté

grosse truite matériel

Lorsque l’on recherche les gros salmonidés, l’attention que l’on porte au matériel revêt un intérêt tout particulier car il sera durement sollicité lors des combats. Chacun de nous devra connaître et maîtriser parfaitement son matériel afin d’appréhender dans les meilleures conditions les combats explosifs. Lorsque l’on est en connexion avec un poisson aux mensurations XL, le moindre détail a son importance et détermine souvent l’issue du bras de fer, d’où l’intérêt d’avoir un équipement adéquat. Nous avons tous pris ou tenu une grosse truite par accident avec un matériel inadapté. Lorsque cela se termine bien, l’égo du moucheur s’en trouve flatté, mais généralement mieux vaut ne pas tenter le diable... La puissance et le poids des gros salmonidés pardonnent peu les erreurs de casting...

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Une affaire de parti pris

Lors des échanges entre confrères pêcheurs, on prend conscience des divergences que chacun affiche lorsqu’il s’agit du choix du matériel de pêche, les convictions et les arguments étant sources de conversations passionnées. Certains ne font confiance qu’à du matériel un peu "lourd", quand d’autres n’hésitent pas à combattre des truites de 60cm sur des cannes dont la puissance ne dépasse pas #3 et avec des pointes des plus ténues !

Le matériel qui vous conforte et vous sécurise, avec lequel vous éprouvez une confiance absolue, sera toujours celui que vous devrez favoriser lors de vos sorties à la recherche du poisson de votre vie. Traquer les poissons trophée impose de pratiquer uniquement avec des outils que l’on connait par cœur afin d'éviter les mauvaises surprises. Chaque élément constituera un fil d’Ariane à ne jamais rompre, du plus infime accessoire jusqu’au plus crucial comme l’ensemble canne/moulinet. Apprendre à sentir travailler son matériel est important. Connaitre les limites de chaque élément, leur point de rupture et leur comportement en situation extrême s’avère tout aussi fondamental. Cela implique de ne pas en changer tous les quatre matins.

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Une relativité induite par les parcours

Au-delà de la taille des salmonidés convoités, le choix du matériel dépendra aussi des parcours que vous fréquentez, et essentiellement du profil de la rivière, de sa puissance et de son encombrement.

Il va de soi qu’une imposante truite piquée sur un plat profond et lent sans trop d’obstacles offrira un combat plus facile à négocier (même avec une pointe assez fine) qu’une autre ferrée au milieu d’un embâcle, perché entre deux arbres de la berge. C’est pour ces multiples raisons que dans les lignes qui vont suivre, je ne vous parlerai que de mes convictions intimes et du matériel qui, à mes yeux, est indispensable. Certains se retrouveront dans ces opinions quand d’autres auront un avis différent, il n’y a pas de vérités absolues. Seuls l’expérience et le vécu forgeront nos convictions.

Le matériel que je décris est celui que j'utilise pour aborder les portions aval des grandes rivières de montagne pyrénéennesIl est donc destiné à des truites dont la taille se situe généralement entre 50 et 75cm. Il y a parfois plus gros dans certaines rivières, mais ces poissons sont malheureusement trop rares pour qu’on évoque ici un matériel spécifique.

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La présence de caches comme cet arbre immergé impose de brider fermement les poissons...
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La canne :

Les cannes polyvalentes permettant une pratique en sèche et en nymphe existent, mais pour ma part, j’utilise une canne pour chaque technique quand cela est possible. J’entends déjà les commentaires du type "comment tu fais pour t’encombrer de la sorte ?"... je répondrais que je ne nie pas les incommodités du transport de deux cannes au bord de l’eau, mais qu'en dehors de ce léger désagrément, je ne trouve que des avantages à avoir une canne spécifique à chaque technique. Prendre deux cannes permet entre autres de s’adapter très rapidement face à des gros poissons qui ne gobent ou ne nymphent que dans des laps de temps parfois très brefs.

Globalement, les modèles munis d’un talon de combat ont ma préférence car ils offrent un confort très agréable lors des batailles. Ils permettent de soulager l’avant-bras sur lequel beaucoup de tension s’accumule. D'ailleurs ce n’est souvent pas la puissance du poisson qui fatigue l’avant-bras mais le stress du pêcheur qui lui fait serrer trop fort le liège !

Les cannes spécifiques pour cette approche devront avoir une tenue de poisson exemplaire en gardant une certaine douceur afin d’éviter les casses sur les rushs les plus violents, tout en capable de présenter délicatement et très rapidement une artificielle à une truite, en effectuant le moins de faux lancers possible ; en effet sur ces gros salmonidés aguerris et éduqués, les faux lancers sont à bannir !

Pour ma part, en sèche, je fais confiance dans la majorité de mes sorties à un modèle d’action relativement fast en 9' soie 5 : la Loomis NRX (NDLR : les chiffres CCS de ce modèle : ERN 5.94 et AA 66°). Dans les pêches très fortes, j'opte pour un modèle un peu plus long et plus puissant : la Sage One 9'6 #6 mais ces situations restent anecdotiques. 

Je choisis généralement une 9' car cette longueur est polyvalente et permet une pêche fluide et confortable. En outre, elle reste efficace et performante quel que soit l’encombrement du poste. La canne doit devenir le prolongement naturel du bras, se faire oublier afin que votre concentration ne s’applique que sur l’action de pêche. Face à une grosse truite, la gestion des émotions impose d’oublier les contraintes dues au matériel pour ne se consacrer qu’au bras de fer qui va se dérouler.  Nous veillerons à choisir un Blank mat habillé d’anneaux peu brillants afin de soigner la discrétion, le moindre éclat pouvant caler un poisson !

Pour la nymphe au fil, optez pour une 10'  #4/5 ou #5. J’utilise avec bonheur depuis 2 ans une Greys GR70 en 10' #5 qui est assez douce afin de pouvoir pratiquer en nymphe au fil et à l’espagnole. Son rapport qualité/prix est excellent. Mon action préférée pour la nymphe est de type moderate fast. La grande longueur facilitera la conduite de ligne durant les dérives et la puissance #5 garantira une bonne tenue des poissons (NDLR : les chiffres CCS de cette canne : ERN 4.90 et AA 65°)

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Le moulinet :

Simple réserve de soie lors des pêches fines sur des poissons de taille raisonnable, le moulinet devient un élément déterminant dans l’issue du combat lors de la recherche des gros salmonidés. Ce sont essentiellement les qualités du frein qui détermineront le choix du modèle. En effet celui-ci devra être progressif et doux afin d’encaisser les éventuels démarrages en trombe. Je vous renvoie pour choisir aux tests de moulinets en cours qui évaluent bien le frein grâce au protocole Truites & Cie.

Aujourd’hui la plupart des moulinets possèdent ces caractéristiques. Nous opterons pour un modèle avec une molette de frein un peu grosse et bien accessible. La contenance devra accepter une bonne longueur de backing en plus de votre soie pour le jour (trop rare) où un poisson s’entêtera à vous vider le moulinet. Comme pour la canne nous veillerons à éviter les modèles trop brillants et préférerons les modèles large arbor dont la récupération est plus rapide. Je suis un inconditionnel des modèles de la marque Nautilus qui offrent toutes ces qualités ainsi qu'une fiabilité à toute épreuve.

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La soie :

Le choix du profil se fera en fonction de l'action de la canne utilisée et de la préférence du pêcheur. Pour ma part, j’affectionne les soies WF et Triangle Taper car elles chargent rapidement les cannes d’action fast que j’utilise. Ce type de soie favorise les roulers et les mendings, tout en proposant une présentation délicate. Le numéro sera accordé à la puissance réelle de la canne.

Les fils :

Nous n'aborderons que le fil utilisé pour la pointe du bas de ligne, les brins supérieurs étant moins problématiques car beaucoup plus épais. Pour lier chacun d'eux, le fameux nœud baril reste une valeur sûre.  

En pointe, j’utilise du nylon ou du fluorocarbone en fonction des conditions rencontrées, dont les diamètres varient de 12 à 16/100. A chaque situation de pêche nous devrons en fonction des paramètres du coup et du degré de méfiance de la truite nous adapter :

Le fluorocarbone sera sollicité pour les pêches en sèche ou émergente, lorsqu'un nylon classique posé sur la pellicule de surface est vraiment trop facilement discernable par des salmonidés éduqués. Pour les pêches en nymphe fines, celui-ci sera aussi de la partie. Je fais confiance à la marque Trouthunter dont les produits ne m’ont jamais déçu.

En début de saison dans des eaux fortes où l’issue des combats dans les tumultes des eaux est parfois aléatoire, j’aime aussi le nylon Stroft GTM en 14 ou 16/100. D’un diamètre réel largement supérieur à celui annoncé, il offre néanmoins un rapport résistance/diamètre réel exceptionnel, je lui fais confiance depuis mes débuts avec une canne à la mouche (NDLR : voir l'article sur les nylons/fluoro). 

Certains gros spécimens particulièrement éduqués et méfiants requièrent parfois l’utilisation de pointes très fines rendant parfois les combats très longs et vecteurs de conséquences désastreuses sur le poisson. Il m'arrive ainsi parfois de descendre en 12/100 voire en 10/100. Ceci est particulièrement courant en période estivale quand la température de l’eau est élevée. Par respect pour ces poissons, veillez toujours à ne pas trop éterniser les combats, il serait dommage que la truite ne s'en relève pas. Reprendre une grosse fario à plusieurs reprises créé toujours une émotion particulière, et tisse presque des liens !

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Les hameçons : 

Quelle que soit leur forme, ils seront en premier lieu adaptés à la mouche afin d'obtenir le volume et la silhouette voulus. Quand ces contraintes le permettent, je privilégie toujours les hameçons relativement fort de fer afin de limiter les risques d’ouverture lors des combats violents. La présence ou l’absence d’ardillon est sujet à de multiples discutions et je dois reconnaître qu’il m’a fallu du temps pour n'utiliser que les références sans ardillon. Avec l’expérience, on parvient à se rendre compte que les décrochages ne sont pas plus nombreux qu’avec les modèles à ardillon, à partir du moment que la tension du fil reste constante. Les deux références d'hameçon que j'utilise le plus dans ma quête des grosses truites sont le Kamasan B405 en forme droite et le Caleri C23 en forme courbe. 

L’épuisette :

Voilà un élément souvent négligé et responsable de nombreuses désillusions... qui n’a pas connu une épuisette trop petite pour faire rentrer un très beau poisson ? Je n’oublierai jamais cette truite qui avait fait ressembler mon épuisette à une ridicule poêle à frire avant de retrouver son élément lors d'un ultime rush, et par la même occasion, avait réussi à bien pourrir ma journée ! Même si cela peut paraître prétentieux, mieux vaut opter pour un grand modèle optimisant la mise au sec de la truite et abrégeant les combats. Le filet devra être doux afin de préserver le mucus des salmonidés et favoriser la remise à l’eau. J'utilise en ce moment un modèle fiable, simple et léger : la JMC x60 de dimensions 40 x 54 x 73 cm.

Les autres éléments de la panoplie ont bien sûr leur importance: l’habillement du moucheur influe sur la discrétion lors de l’approche, tout comme la brillance de la canne et du moulinet. Plus on est discret mieux c’est ! Un gilet bien organisé et des waders bien étanches favorisent le confort durant l’action de pêche et donc une concentration accrue.

N’oubliez pas que le choix du matériel demeure personnel et que celui qui comble votre binôme ne vous est pas forcément adapté !

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Marryat Tactical Pro

A propos de l'auteur

Originaire de Toulouse (l'accent ne trompe pas !), Lionel pêche exclusivement les salmonidés à la mouche (sèche et nymphe) dans tous les milieux qui en contiennent…